Journal-24

Téléchargez le PDF:
Download PDF - Télécharger le PDF

Journal-24

Ramona Connor, Vice-president, Collectivity of Saint Martin, Vice-president, AGOA management council
Ramona Connor, Vice-présidente de la Collectivité de Saint-Martin,Vice-présidente du Conseil de gestion d’AGOA

Ramona Connor
Vice-présidente de la Collectivité de Saint-Martin
Vice-présidente du Conseil de gestion d’AGOA

À l’heure où l’état de santé de notre planète est mis à mal par l’influence grandissante des activités de l’Homme, la citoyenne que je suis a pleinement conscience de l’importance et de l’urgence de la protection de notre biodiversité. Le monde entier est concerné par cette menace, et le rétablissement vers une situation plus équilibrée ne pourra se faire qu’avec un regain de lucidité générale. Concrètement, au jour le jour, sur notre petite île, cela signifie qu’il est indispensable de faire les bons gestes et les bons choix en faveur de notre environnement et de notre patrimoine. C’est pourquoi je ne peux que soutenir et encourager le travail de la Réserve naturelle. La mise en place de pépinières de coraux, l’élaboration d’habitats artificiels pour les espèces marines, la protection des mammifères marins ou bien sûr la création de l’Institut caribéen de la biodiversité insulaire sont des actions qui vont dans le bon sens. À notre échelle, c’est en donnant l’exemple et en communiquant largement que nous participerons à un monde meilleur, et que nous ferons de notre île un endroit où il fait bon vivre.

L’amélioration des connaissances sur les espaces et les espèces protégées

Les éponges constituent la plus grande partie des récifs coralliens de la Caraïbe © Julien Chalifour
Les éponges constituent la plus grande partie des récifs coralliens de la Caraïbe © Julien Chalifour

La mission Pacotilles, dont l’objectif a été la collecte de coraux, d’éponges, d’algues et de petits crustacés à l’échelle de l’arc antillais et donc à Saint-Martin, afin d’améliorer la connaissance sur la biodiversité des fonds marins dans les Petites Antilles, s’est déroulée en deux phases. La seconde phase a eu lieu les 26 et 27 mai, avec la participation de scientifiques principalement intéressés par les éponges, qui constituent la plus grande partie des récifs coralliens de la Caraïbe - contrairement aux récifs du Pacifique et de l’Océan Indien, majoritairement constitués de coraux. Inscrites au menu des tortues imbriquées et des poissonsanges, certaines de ces éponges tendent à se développer dans la pénombre, dans les anfractuosités du récif, où elles sont moins prédatées. À leur surprise, ces scientifiques ont constaté l’absence à Saint-Martin d’espèces d’éponges très présentes en Guadeloupe et a contrario une grande abondance d’éponges calcaires, de plus grande taille que leurs soeurs guadeloupéennes et martiniquaises. Les chercheurs ont procédé à des relevés de terrain, pris des photos, prélevé des échantillons et leurs analyses devraient permettre d’expliquer ces différences et peut-être de révéler la présence d’espèces encore inconnues, les espèces d’éponges se comptant par milliers. La Réserve naturelle, qui avait répondu favorablement à la demande d’autorisation de plongée et d’inventaire des responsables de la mission Pacotilles, sera informée des résultats, qui donneront éventuellement lieu à la mise en place d’une protection accrue de certaines zones colonisées par ces espèces.

Les grandes missions d’inventaire scientifique sont rares, surtout dans le cas d’espèces relativement peu étudiées, comme c’est le cas pour les éponges. Elles suscitent depuis peu l’intérêt croissant de l’industrie pharmaceutique, dans la mesure où certaines de leurs molécules pourraient bloquer l’apparition de maladies.
© Océane Beaufort
© Océane Beaufort

La troisième session du programme Negara - comme Negaprion, nom scientifique du requin citron - s’est déroulée du 18 au 23 mai 2015, toujours sous la responsabilité d’Océane Beaufort, spécialiste de ce grand poisson cartilagineux couramment observé le long des plages au stade juvénile et le plus en contact avec les baigneurs. Une équipe de la Réserve naturelle et la jeune scientifique ont mis le cap sur le lagon de Tintamare, au sud de l’îlot, où ils ont testé une senne acquise par la Réserve naturelle, dans le but de capturer sans les blesser les requins citron. Cette technique moins agressive que la pêche à l’hameçon est toutefois difficilement praticable dans les zones rocheuses ou en présence de sargasses. Un seul individu a pu être capturé et a été marqué deux fois : à l’aileron avec un tag et sous la peau à l’aide d’une puce. La raison de l’absence des requins citron juvéniles marqués sur ce site en 2014 reste mystérieuse. Ont-ils migré ? Ont-ils été victime de Gonzalo ? D’un prédateur ? L’intérêt de ce marquage réside dans le fait qu’il devrait permettre d’apporter des réponses aux nombreuses questions que se posent les scientifiques sur cette espèce mal connue.

Green turtle equipped with a beacon and an antenna © Julien Chalifour
Green turtle equipped with a beacon and an antenna © Julien Chalifour

Quatre tortues vertes ont été capturées dans la baie Blanche de Tintamare - puis relâchées - dans le cadre de l’opération Sea- Tag, du 14 au 16 juin 2015. Ce projet, financé par l’Europe, la Région Guadeloupe, la DEAL, le fonds Biome et la Fondation EDF a pour objectif d’améliorer la connaissance sur les tortues vertes dans l’archipel guadeloupéen. Éric Delcroix, chargé de mission pour la Réserve naturelle de Petite-Terre, était là, aux côtés d’Antoine Chabrolle, en charge du plan de restauration des tortues marines à l’ONCFS, ainsi que d’Océane Beaufort et de Caroline Cestor- Magro, de l’association Kap Natirel. Les quatre tortues vertes évoluaient sur leur aire d’alimentation au moment de leur capture, et n’étaient donc pas en phase de reproduction. Elles ont été mesurées, baguées et surtout deux d’entre elles ont été équipées d’une balise Argos très évoluée. Ce suivi satellitaire mémorise non seulement leurs déplacements et les zones qu’elles fréquentent, mais renseigne aussi sur le nombre de leurs plongées, leurs durées et à quelle profondeur elles se déroulent. Ces informations sont disponibles en permanence sur le site seaturtle. org, en entrant le nom de l’animal dans la case «animal finder». Le Pôle scientifique de la Réserve naturelle est intéressée par toutes les photos de Sasha et Joe – très reconnaissables grâce à leurs balises rouges – à envoyer sur science@rnsm.org. Merci de veiller à ne pas trop harceler ces deux individus et à surtout ne pas endommager le dispositif fixé sur leur dos (la balise et son antenne), afin qu’ils continuent de nous renseigner sur leurs habitudes de vie au cours des sept prochains mois.

La trentaine d’écovolontaires participant au suivi annuel des pontes de tortues se sont retrouvés sur la plage de Baie Longue pour une sortie nocturne, le 26 août de 20h00 à 0h30. L’équipe a pu observer trois tortues vertes, dont deux sont rapidement retournées à la mer. La troisième a commencé de creuser son nid, avant de changer d’avis et de rejoindre les flots. Les écovolontaires du secteur ont relevé 80 traces de tortues à Baie Longue en août 2015, et 39 en juillet. Rappelons que la saison des pontes s’étend de mars à novembre et qu’il faut veiller à ne pas déranger ces animaux durant cette période.
Caroline Fleury et un iguane des Petites Antilles (Iguana Delicatissima) | Caroline Fleury holding an iguana (Iguana Delicatissima)
Caroline Fleury et un iguane des Petites Antilles (Iguana Delicatissima) | Caroline Fleury holding an iguana (Iguana Delicatissima)

Caroline Fleury, en poste au pôle scientifique de la Réserve depuis février 2015, a prêté main-forte à La Désirade, à l’occasion du suivi annuel de la population d’iguanes des Petites Antilles (Iguana delicatissima), du 6 au 10 juin 2015. Cette expérience lui a permis de se familiariser avec la capture, la manipulation et le marquage de cette espèce en voie de disparition. L’opération était coordonnée par l’association Le Gaïac et financée par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), référent pour tout ce qui concerne ce reptile dans les Antilles françaises..

La maîtrise des impacts anthropiques sur les espaces protégés

Les singes verts étant de plus en plus nombreux à Saint-Martin, leur problématique prend de l’ampleur. Cette espèce introduite est présente sur les deux côtés de l’île et le gouvernement de Sint Maarten a sollicité la Réserve naturelle en vue d’une collaboration transfrontalière pour la gestion de leur population. De nombreux habitants ont été amenés à observer des groupes de singes verts évoluant en milieu naturel, mais aussi dans des zones périurbaines, comme à Concordia, Hope Estate, Rambaud ou aux Terres Basses. Certaines personnes se sont retrouvées nez à nez avec un singe chapardant de la nourriture dans leur cuisine et certaines d’entre elles ont constaté un comportement agressif face à des humains ou des animaux domestiques. Ces primates sont également responsables de vols et de dégradation dans les jardins et les potagers. Plusieurs décisions ont été prises à l’occasion des deux premières réunions de travail : recensement des singes verts et estimation de leur population, perception de leur présence auprès du public et mise en place d’un suivi de localisation de leurs territoires. L’éventualité d’une régulation de leur natalité a été envisagée, mais pas leur éradication. En effet d’autres îles, comme Saint-Kitts, ont bien tenté de contrôler la population de ces singes en les tuant au fusil, mais sans résultat probant. Cette initiative transfrontalière s’organisant autour du singe vert pourrait être la toute première collaboration d’une série visant à la mise ne place d’une meilleur gestion des espèces invasives de notre ile : l’iguane commun, le poisson lion, la reinette de Cuba, l’achatine, la mangouste ou la liane corail… Comme souvent lorsque l’on parle de collaboration entre les deux parties de l’île, certaines actions vont se heurter à des réglementations différentes. Si Sint Maarten envisage de marquer les animaux au paint ball pour leur recensement, cette approche semble plus complexe à mettre en oeuvre au regard de la réglementation française. La Réserve étant uniquement compétente sur le territoire qu’elle gère, en dehors de ce périmètre, les futures actions devront intégrer les services compétents de la Collectivité et de l’État.

Deux phases étaient prévues par le Conservatoire du littoral pour la réhabilitation du site de Babit Point, à Oyster Pond. La première phase est terminée, avec la démolition de la maison en ruines et la mise en place d’une clôture tout autour du site, afin d’empêcher l’accès des véhicules. La seconde phase, qui consistera à mettre en valeur la beauté du paysage de ce site, se fera un peu plus tard, en accord avec l’ensemble des riverains du quartier.

Les ruines du Galion vues du ciel Aerial picture of the ruins in The Galion
Les ruines du Galion vues du ciel Aerial picture of the ruins in The Galion

Les démêlés judiciaires qui opposaient le Conservatoire du littoral et la SCI Le Galion, propriétaire de la parcelle AW16 sur laquelle continuent de se dégrader les ruines de l’ancien hôtel, viennent enfin de connaître un avancement positif, avec la fixation du prix de ce terrain par la justice. En conséquence, le Conservatoire peut prendre possession des lieux et procéder à la démolition de ces constructions disgracieuses. Six mois de travaux et un budget de 660 000 euros sont prévus pour la destruction. Ce budget élevé est dû à la présence d’amiante dans les bâtiments et à la réglementation très stricte liée au traitement de ce polluant dangereux. L’appel d’offres est en cours : le chantier commencera en début d’année prochaine et se terminera dans le courant du second semestre 2016. Le Conservatoire consacrera 1 M€ au total sur le projet du Galion, avec la remise en état du site et son aménagement pour le public, qui bénéficiera d’un mobilier adapté aux piqueniques et au repos. L’étude de valorisation effectuée par le Conservatoire prévoit la canalisation de la circulation des véhicules, ainsi que l’intégration dans le paysage d’une base nautique et d’un snack. En accord avec la Collectivité et à l’issue de cette réhabilitation, une convention tripartite définira les rôles de chacun.

La piscine flottante du Galion accueillant des scolaires, la réglementation impose à la Collectivité de prévoir la présence d’un maître nageur sauveteur (MNS). Et qui dit MNS, dit poste de secours. Cette obligation étant liée à la sécurité des jeunes, le Conservatoire a autorisé la Collectivité à mettre en place cette construction légère en bordure de la plage.

54 rats ont été piégés en deux semaines à Tintamare ainsi que 23 rats et 6 souris en une semaine à Pinel, au cours d’une campagne de captures menée en juillet 2015. Ces chiffres restent modestes lorsqu’on les compare à la campagne 2013, au cours de laquelle 268 rats avaient été tués à Tintamare, et 78 rats et 41 souris à Pinel. La réduction des ressources alimentaires en raison de la sécheresse est la cause probable de la moindre présence de rongeurs sur ces deux îlots. Également, à Pinel, les restaurateurs gèrent les déchets alimentaires au mieux et procèdent également à des actions de régulation. Espèces introduites, rats et souris sont friands d’oeufs d’oiseaux et de tortues marines. À Tintamare, les rats s’attaquent au gaïac, dont ils dévorent les graines. Cette opération, coordonnée par la Réserve, a été rendue possible grâce au travail des stagiaires Nathan Leroy et Thierry Mordon-Constant.

Après une première expérience décevante, le Conservatoire du littoral relance le projet d’installation de toilettes sèches à Pinel. Grâce à l’expérimentation réussie de l’un des restaurateurs de l’îlet, qui a installé avec succès des toilettes fonctionnant selon un nouveau système technique adapté au climat tropical, le Conservatoire va mettre en place trois autres dispositifs sanitaires, en collaboration avec la Réserve naturelle. Le premier sera installé très prochainement et les deux autres au printemps 2016.

Actions de Police

Un jardinier également vendeur de coquillages s’étant installé selon son bon vouloir le long de l’étang aux Poissons pour exercer diverses activités, il a été verbalisé par les gardes le 17 juin 2015. Cet individu avait défriché les abords de l’étang pour y planter des cocotiers et des palmiers et vendait des lambis - espèce protégée dont la pêche est réglementée - aux éventuels touristes qui s’arrêtaient devant son étal en plein air. Il a été verbalisé pour occupation illégale du territoire de la Réserve naturelle, destruction non autorisée sur un espace classé en réserve naturelle, exercice d’activités forestières et agricoles dans une réserve naturelle et enfin exercice d’activités commerciales et artisanales, toujours dans une réserve naturelle. Le 30 juillet, les gardes de la Réserve ont procédé à l’arrachement de toutes les plantations. Le PV suit son cours

Le 27 juin 2015, le refuge pour animaux de l’association Pawsitive,
situé dans la Réserve naturelle le long de la route du Galion, a écopé d’un nouveau procès-verbal pour avoir défriché sans autorisation sur un site classé en réserve naturelle et également pour avoir procédé à des travaux non autorisés, en l’occurrence la pose d’une clôture.

Le 23 septembre,
un pêcheur a été surpris en pleine action dans la passe de Pinel, en possession de 8 lambis vivants, qui ont été rejetés à l’eau.

La restauration des milieux et des populations dégradées

Le travail se poursuit sur les trois pépinières de coraux créées au printemps 2015, autour de Tintamare, de Caye Verte et de Pinel. Il faudra attendre un an avant de pouvoir significativement évaluer la croissance des boutures qui, bien arrimées à leurs structures, ont supporté le passage des récentes tempêtes sans broncher. L’observation a révélé une période critique d’acclimatation d’environ deux semaines, au-delà de laquelle le taux de survie est de 100%. Au préalable, la Réserve avait pris soin de prélever les échantillons de corail – Acropora sp., et plus particulièrement «cornes de cerf» (Acropora cervicornis) et «cornes d’élan» (Acropora palmata) – sur plusieurs sites, afin d’assurer une bonne diversité génétique et favoriser la résistance des jeunes colonies. Des initiatives similaires voient le jour en Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Barthélemy, cette dernière île collaborant avec Saint-Martin au travers d’un échange technique sur les bonnes pratiques relatives à ces pépinières. Dernière précision : Nicolas Oury, étudiant à l’école Intechmer de Cherbourg et futur technicien supérieur de la mer, a récemment soutenu son diplôme sur ce sujet qu’il connaît bien, après cinq mois de stage consacrés à la création de ces pépinières.

Les sargasses… Un sujet d’actualité pour lequel la Collectivité de Saint-Martin sait qu’elle va devoir trouver une solution pérenne. La Réserve naturelle, qui a catalysé les réunions entre tous les services concernés – la préfecture, la Collectivité, mais aussi l’agence régionale de santé (ARS), en raison du risque sanitaire lié aux émanations de gaz H2S – a organisé en octobre 2015 la formation des brigades vertes de la Collectivité, pour le meilleur traitement de ces monceaux d’algues qui n’arrêtent pas d’envahir les côtes au vent de Saint- Martin. Il est impératif d’étaler et de faire sécher les sargasses trois ou quatre jours afin qu’elles perdent jusqu’à 80% de leur volume, avant leur transport vers l’écosite de Grandes Cayes. Ce séchage exigeant un périmètre important, le Conservatoire propose de mettre à disposition une large surface au bord de la Saline d’Orient

Une fois n’est pas coutume, les gardes de la Réserve naturelle ont mis le feu sur l’îlet Pinel.
Il s’est agi de brûler l’excès de déchets verts amassés après le passage du cyclone Gonzalo, en octobre 2014, dont la masse trop importante – environ 100 mètres cubes – empêchait la dégradation naturelle. Avec une autorisation de la préfecture, en présence des pompiers et avec l’aide des restaurateurs, cet imposant monticule a été réduit en cendres.

La communication et l’éducation environnementale

L’étang de Chevrise vu du ciel | Aerial view of Chevrise Pond
L’étang de Chevrise vu du ciel | Aerial view of Chevrise Pond

Bonne nouvelle pour les amis des oiseaux! Grâce au produit de la redevance récemment mise en place pour le stationnement des véhicules sur le site, le Conservatoire du littoral et la Réserve naturelle lancent la construction d’un quatrième observatoire, sur le parking de la résidence Mont Vernon. Dès la fin de l’année, il sera possible d’observer dans les meilleures conditions l’avifaune qui fréquente l’étang de Chevrise. Cet étang détient la palme du «birdwatching» en matière de densité, puisque l’on peut y observer plus de 1000 oiseaux en seulement un quart d’heure! On attend avec intérêt de découvrir l’architecture originale de ce nouvel équipement, dont la surface sera suffisante pour accueillir une classe entière. Grâce à ses quatre observatoires – à l’étang de la Barrière à Cul-de-Sac, l’étang du cimetière à Grand-Case, la mare Lucas à Oyster Pond et très bientôt l’étang de Chevrise – Saint- Martin se fait une vraie place dans le tourisme lié au «birdwatching», en pleine expansion, notamment aux Etats-Unis. Localement, l’occasion de découvrir les nombreuses espèces d’oiseaux présentes sur les étangs incitera certainement le public à modifier sa vision parfois négative de ces écosystèmes pourtant essentiels et si riches.

L’optimisation des moyens pour assurer la qualité des missions

Ashley Daniel en patrouille en mer avec son collègue Steeve Ruillet | Ashley Daniel patrolling at sea with her colleague, Steeve Ruillet
Ashley Daniel en patrouille en mer avec son collègue Steeve Ruillet | Ashley Daniel patrolling at sea with her colleague, Steeve Ruillet

L’équipe des trois gardes s’est renforcée avec l’arrivée d’Ashley Daniel, 20 ans, embauchée en contrat avenir depuis le 1er juillet 2015. Ce contrat d’un an est éventuellement renouvelable. Ashley a posé sa candidature pour travailler à la Réserve naturelle après avoir obtenu son baccalauréat, parce qu’elle aime les animaux, la nature et travailler en plein air. «J’aime beaucoup faire partie du personnel de la Réserve, je vois comme tout le monde travaille ensemble et c’est super. Je découvre plein de choses nouvelles, dont les patrouilles en mer et j’adore la navigation,» nous dit-elle. Reste à souhaiter à Ashley de saisir sa chance et de renforcer ses connaissances au travers de ses expériences et des formations qu’elle aura la possibilité de suivre

Les gardes de la Réserve naturelle de Saint-Martin ont procédé à 155 patrouilles en mer entre le 1er janvier et le 1er octobre 2015, dont 60 patrouilles depuis le 1er mai. Sur ces 60 contrôles, seulement 13 sont considérés comme «non conformes» et ont donné lieu à un avertissement oral ou à un procès-verbal. Les gardes se conforment à un plan de contrôle bien défini, inclus dans le plan de contrôle national qui rassemble toutes les actions de police de la nature de toutes les entités : réserves et parcs naturels, parcs marins, direction de la mer, Office national des forêts, Office national de la chasse et de la faune sauvage…
Le forum régional des gestionnaires d’aires marines protégées | The regional forum for the protection of marine areas
Le forum régional des gestionnaires d’aires marines protégées | The regional forum for the protection of marine areas

Les 25 et 26 juin 2015, les principaux gestionnaires d’aires marines protégées dans les Antilles françaises se sont retrouvés à l’hôtel Mercure dans un seul but : avancer dans la bonne direction. La Réserve naturelle de Saint- Martin était représentée en force, aux côtés du Conservatoire du littoral, de l’Agence de l’Environnement de Saint-Barth, du Parc national de Guadeloupe, du sanctuaire Agoa et des Directions de l’environnement (DEAL) de Martinique et de Guadeloupe. Ce forum régional, émanation du forum national des gestionnaires d’aires marines protégées, avait pour objectif de mettre en contact tous les acteurs du secteur afin qu’ils partagent leurs expériences et leurs connaissances, et mettent en commun leurs moyens pour mener au mieux leurs actions de conservation. Une vingtaine de sujets ont été abordés, parmi lesquelles la nouvelle loi sur la biodiversité dont le principe est d’éviter, réduire et compenser les atteintes à la nature, sous son angle caribéen. Cette notion nouvelle de «compensation» trouvera par exemple son application dans le projet du grand port maritime de Guadeloupe, avec un programme de mesures de restauration incluant le transfert des colonies coralliennes menacées par le tracé du nouveau chenal. Le projet de création d’un réseau chargé de suivre l’état de santé du milieu marin dans la zone des Îles du Nord - Saint-Martin, Sint Maarten, Saint-Barth, Anguilla, Saba et Saint-Eustache - a fait l’objet d’une présentation, afin d’améliorer les résultats, harmoniser et faciliter la tâche des gestionnaires qui travaillent aujourd’hui sur les mêmes sujets, mais isolément. Également, la gestion de la fréquentation – voire la surfréquentation – du public dans les aires marines protégées était inscrite à l’ordre du jour. Cet atelier visait à faire définir un cahier des charges optimal prenant en compte le délicat équilibre entre la capacité d’accueil des sites, le maintien des activités économiques et la conservation des écosystèmes.

L’étang de la Barrière | The Barrière pond
L’étang de la Barrière | The Barrière pond

Le Conservatoire, propriétaire de deux parcelles qui rendraient bien service à la Collectivité dans le cadre du projet de construction de la nouvelle station d’épuration (STEP) de Quartier d’Orléans, a proposé à cette dernière d’échanger une partie de ces terrains contre un site naturel situé en bordure des berges de l’étang de la Barrière, à Cul-de-Sac. L’échange est gagnant-gagnant : la future STEP, prévue pour traiter les eaux usées équivalentes à 18 000 habitants, nécessite une grande surface pour sa mise en place ; et le Conservatoire, pour sa part, aura la possibilité de gérer les berges de l’étang. Cette gestion, tout à fait logique, n’est aujourd’hui possible sur aucun étang, la propriété du Conservatoire se limitant aux eaux des quatorze étangs concernés.

Le renforcement de l’intégration régionale

Le 22 octobre 2014, la ministre de l’environnement, Ségolène Royal, et la ministre de l’outremer, George Pau-Langevin, lors de leur visite officielle en Guadeloupe, ont présidé l’installation du conseil de gestion du sanctuaire Agoa de protection des mammifères marins dans les Antilles françaises. Le 21 mai 2015, ce conseil de gestion a tenu sa première réunion à la préfecture de Fort-de-France. Ses 53 membres ont élu Yvon Combes au poste de président, pour une durée de trois ans. Actuellement premier viceprésident de l’association des maires de Guadeloupe, Yvon Combes a fait toute sa carrière professionnelle au sein de l’Office national des forêts et a oeuvré à la mise en place du Parc national de la Guadeloupe. Ramona Connor, deuxième viceprésidente de la Collectivité de Saint-Martin, fait partie des trois vice-présidents du conseil. Afin de faciliter le fonctionnement du sanctuaire Agoa, le conseil de gestion a mis en place un bureau de seize membres, au sein duquel Saint-Martin est bien représenté, avec Bulent Gulay, président de l’association Métimer ; Stéphane Mazurier, viceprésident de Métimer ; Kate Richardson, directrice de l’Office du tourisme et Nicolas Maslach, directeur de la Réserve naturelle. Le conseil a rendu son premier avis, à l’unanimité, en se prononçant contre une campagne océanographique utilisant les techniques de prospection sismique, compte tenu des niveaux de puissance émis, susceptibles d’entraîner des impacts importants sur les mammifères marins. Une commission de coopération internationale a également été créée, afin de travailler sur la meilleure stratégie pour la protection des mammifères marins dans la région caraïbe, mais aussi au-delà. Les membres du bureau se sont réunis à Saint-Barthélemy le 29 septembre, puis le conseil de gestion s’est réuni à Saint-Martin le 6 novembre 2015 (détails dans le prochain journal).

Créé le 23 octobre 2012, le sanctuaire Agoa couvre une superficie de 143 256 km2, soit la totalité de la zone économique exclusive des Antilles françaises. Son objectif est de garantir un bon état de conservation des mammifères marins en les protégeant, ainsi que leur habitat, et d’évaluer les impacts directs ou indirects, avérés ou potentiels, des activités humaines.
© Agence des aires marines protégées
© Agence des aires marines protégées

Le programme REMMOA - pour «recensement des mammifères marins et autre mégafaune pélagique par observation aérienne» - lancée en 2008 dans les Antilles, par l’Agence des aires marines protégées se poursuit en 2016 sur 6 semaines, entre août et octobre. Ce programme national a pour objectif d’améliorer les connaissances sur les espèces telles que les mammifères et les oiseaux marins, les raies, les requins et les tortues marines, afin de renforcer leur protection. À l’issue de la première phase qui a permis de collecter les données, succède cette deuxième phase où les différentes zones marines couvertes par REMMOA – Martinique, Dominique, Guadeloupe, Saint-Barth, Saint- Martin, Sint Maarten, Saba, Saint-Eustache – vont faire l’objet d’un nouveau survol. La comparaison entre les résultats des deux phases devrait permettre d’estimer l’évolution des populations des différentes espèces et apportera des informations utiles sur la qualité du milieu marin. Cette deuxième phase a débuté aux Antilles françaises, dont la zone économique exclusive s’étend sur 143 256 km², soit la superficie du sanctuaire Agoa. Le programme fournit aussi une image de la répartition en mer de certaines activités humaines - trafic maritime, pollution, pêche… - qui pourraient être sources de menaces envers la mégafaune pélagique sur cette même zone. Cette campagne est l’occasion de premiers échanges techniques et scientifiques concrets avec le sanctuaire Yarari (lire encadré) tout juste créé par les Pays-Bas, mais également avec La Dominique.

Yarari dans la lignée d’Agoa
À l’image de la France, les Pays-Bas viennent de concevoir Yarari, sanctuaire pour les mammifères marins - et les requins -, dans les eaux territoriales de Saba et de Bonaire. Comme Agoa, Yarari est un terme amérindien que l’on pourrait traduire par «havre de paix» ou «lieu de bien-être». Concrètement, une réglementation détaillée définit la protection de ces animaux marins dans les domaines les plus divers, comme le transport maritime, les compétitions de bateaux à moteur ou l’interdiction formelle de pêcher un requin. Le sanctuaire Agoa a accueilli cette nouvelle avec joie, la création de ce sanctuaire permettant d’agrandir le réseau déjà existant d’aires marines protégées dédiées à la protection des mammifères marins, et d’envisager des coopérations et des jumelages avec celles-ci.

Dans le cadre d’une visioconférence, Yvon Combes, président du conseil de gestion d’Agoa en Guadeloupe; Amandine Eynaudi, déléguée pour le sanctuaire Agoa au sein de l’agence des aires marines protégées en Guadeloupe également et Stéphane Jérémie, président de l’association Sepanmar en Martinique, ont pu échanger avec Ramona Connor, vice-présidente du conseil de gestion d’Agoa ; Romain Renoux, correspondant du sanctuaire Agoa à Saint-Martin et Stéphane Mazurier, membre du bureau et loueur de bateaux, tous trois réunis à la préfecture de Saint-Martin le 25 septembre 2015. L’objectif était de faire un état des lieux des actions de coopération menées par Agoa dans le passé, mais aussi d’éclaircir le cadre institutionnel du sanctuaire, entre la convention de Carthagène signée par la plupart des états de la Caraïbe en 1983 pour la protection et la mise en valeur du milieu marin dans cette région, et le CAR-SPAW, partenaire d’Agoa dont la mission est de protéger la biodiversité marine dans la grande région caraïbe.

OKOTCF : les participants
OKOTCF : les participants

C’est à l’invitation du gouvernement de Gibraltar que les territoires ultramarins britanniques du monde entier se sont réunis du 9 au 15 juillet 2015, pour le «United Kingdom Overseas Territories Conservation Forum» (UKOTCF).Cet événement, qui avait eu lieu précédemment en 2009 aux îles Cayman, a vu la participation des gestionnaires d’aires naturelles protégées britanniques du Pacifique, de l’Océan Indien, de l’Atlantique Nord et Sud et de la grande région de la Caraïbe. Ces territoires sont concernés par le projet européen BEST, qui permettra à la commission européenne de disposer des informations indispensables pour sélectionner et financer les projets les plus judicieux en faveur de la conservation de la biodiversité ultramarine. Romain Renoux, en charge du projet BEST pour les 15 territoires européens de la Caraïbe au sein du pôle coopération régionale de la Réserve naturelle, a présenté l’avancement de son travail d’identification des zones clés de la biodiversité, tout comme l’a fait pour sa région son homologue de l’Atlantique Sud Maria Taylor, basée aux îles Falklands. Un intérêt majeur de ce forum a été de mettre en commun les expériences de chacun, même si au final il est évident que les méthodologies restent identiques, à des milliers de kilomètres de distance et dans des environnements très différents.

Invitation à l’embarquement
Romain Renoux, également en charge de la gestion du sanctuaire Agoa à Saint-Martin, et Amandine Eynaudi, déléguée pour le sanctuaire Agoa au sein de l’agence des aires marines protégées, ont saisi l’occasion pour présenter le sanctuaire Agoa, ainsi que la coopération qui se met en place avec les îles des Antilles néerlandaises. De là à suggérer aux îles britanniques de la Caraïbe (Anguilla, Iles Vierges Britanniques, Îles Cayman, Montserrat, Turks et Caicos) d’embarquer dans l’aventure il n’y avait qu’un pas, qu’ils ont franchi en les invitant à rejoindre le navire. La réponse est «oui» et un premier contact officiel avec le gouvernement d’Anguilla va permettre de promouvoir les échanges techniques et scientifiques pour la protection des mammifères marins. Cette première étape permet d’imaginer un agrandissement de la zone déjà protégée, grâce au travail de communication et de sensibilisation que mène Agoa depuis sa création. Bravo !

Romain Renoux a participé à la «Green Week 2015», plus grand événement annuel sur la politique européenne de l’environnement, qui s’est déroulé à Bruxelles du 3 au 5 juin sur le thème «nature et biodiversité». En charge du projet BEST pour les 15 territoires européens de la Caraïbe au sein du pôle coopération régionale de la Réserve, Romain Renoux a fait un point d’étape sur l’avancement de ses travaux, comme l’ont également fait ses homologues de toute l’Europe ultramarine autour du monde.

© Julien Chalifour
© Julien Chalifour

La Commission européenne lance BEST 2.0 et renforce son soutien à la sauvegarde de la biodiversité ultramarine en offrant de nouvelles possibilités de financements aux Pays et territoires d’outre-mer (PTOM). Dans la Caraïbe, Saint-Barthélemy, les 5 territoires britanniques et les 6 territoires néerlandais sont concernés par cette bonne nouvelle, qui s’accompagne de 6 M€ sur une période de 5 ans. Des études sont en cours pour que les régions ultrapériphériques (RUP) – Guadeloupe, Martinique et Saint-Martin dans la Caraïbe – bénéficient d’une initiative similaire. À suivre donc… Bien sûr, les RUP ont déjà accès aux fonds européens, pour peu que leurs élus considèrent la protection de leur environnement comme un enjeu majeur de leur stratégie politique. Gageons qu’ils feront le bon choix! Du côté des PTOM, un premier appel à projets a été lancé, assorti de 400 000 € de subventions. Les projets seront examinés par un comité d’experts, puis suivis par Romain Renoux et Amandine Vaslet, l’équipe en charge du projet BEST pour les territoires européens de la Caraïbe, au sein du pôle coopération régionale de la Réserve naturelle de Saint-Martin. Leur mission sera d’accompagner au mieux les porteurs de projets et de veiller à ce que les financements correspondent aux enjeux identifiés lors de leurs consultations avec les acteurs locaux dans chaque territoire. Ils travailleront de concert avec Julie Belmont, nouvelle recrue BEST, basée au CAR-SPAW en Guadeloupe et en charge du suivi de ces nouveaux financements.

 

L’équipe de BEST a rencontré la Martinique The BEST team has met with Martinique
L’équipe de BEST a rencontré la Martinique The BEST team has met with Martinique

Les consultations menées par Romain Renoux et Amandine Vaslet se poursuivent dans toute la Caraïbe.Après Saint-Barthélemy, la Guadeloupe, les six îles néerlandaises et Anguilla, l’équipe en charge du projet BEST a travaillé avec les acteurs locaux de Martinique, des Îles Vierges Britanniques et de Saint-Martin. L’objectif est de rencontrer le plus large panel possible d’actifs impliqués dans la protection de l’environnement naturel, de leur présenter le projet BEST et de recueillir leurs réactions et leurs projets en terme de conservation de la biodiversité. Si les enjeux peuvent être différents, la méthodologie reste la même. Il s’agit de définir des priorités d’action, en considérant notamment les espèces menacées, endémiques et les écosystèmes. Une cartographie permet de visualiser clairement les zones clés terrestres et marines pour la biodiversité, reflétant un rôle écologique majeur. À Saint-Martin, des enjeux transfrontaliers avec Sint Maarten ont pu être soulignés.

Les participants aux réunions BEST
En Martinique : le Parc naturel régional et les deux réserves naturelles nationales, la DEAL, le Conseil régional, l’Agence des aires marines protégées, l’association Martinique Entomologie et l’association OcéAnvironnement. À Tortola (BVI) : le National Trust des BVI, le ministère des ressources naturelles et de l’environnement, le Conservation and Fisheries Department, l’Agriculture Department, ainsi que plusieurs associations et experts locaux. Une réunion a également eu lieu avec le gouverneur des BVI, afin de présenter le projet BEST. À Saint-Martin : la Collectivité de Saint- Martin, la Préfecture, la Réserve naturelle, le Conservatoire du littoral, les associations «Les fruits de mer» et «Mon école, ma baleine».
? Haut