Journal-29

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Journal-29

Daniel Gibbes, Président de la Collectivité de Saint-Martin
Daniels Gibbes

L’année prochaine, notre Réserve naturelle fêtera son vingtième anniversaire.

Depuis près de deux décennies, l’équipe dynamique et impliquée de la Réserve naturelle de Saint-Martin a su concilier nos spécificités locales et la conservation de la riche biodiversité de notre île.

A Saint-Martin, on a souvent opposé développement économique et préservation de l’environnement. Les deux vont pourtant de pair ! Notre territoire vit du tourisme : si nous n’offrons pas à nos visiteurs des sites préservés, des plages propres, des eaux de baignade de qualité, ils ne viendront plus ! Le maintien de notre biodiversité et la préservation des différents écosystèmes marins et terrestres à Saint Martin sont une priorité. Dans l’objectif d’améliorer toujours plus notre cadre de vie, je souhaite en outre que nous nous investissions dans des thématiques importantes pour la lutte contre le changement climatique et en faveur du développement durable. Je pense notamment par exemple à la lutte contre la prolifération des espèces invasives mais aussi à la reconquête des berges des étangs, avec la création de sentiers pédestres autour de ces zones humides qui ne sont pas des poubelles, mais des espaces de découverte !

Je soutiens en outre pleinement le projet d’Institut caribéen de la biodiversité insulaire, qui va permettre de renforcer nos réflexions, nos moyens et nos stratégies en matière d’aménagement du territoire, d’urbanisme et de consommation d’énergie : je souhaite que ce bel outil, au service de notre territoire et de sa population, sorte rapidement de terre. Daniel GIBBES Président de la Collectivité de Saint-Martin

L’amélioration des connaissances sur les espaces et les espèces protégées

L’équipe prête à poser une balise - The team ready to place a satellite beacon © Agence de l’environnement de Saint-Barth
L’équipe prête à poser une balise - The team ready to place a satellite beacon © Agence de l’environnement de Saint-Barth

L’objectif de la mission Megara est de renforcer les connaissances sur les baleines à bosse, dans tous les domaines. Cette année encore, du 13 au 18 mars, la Réserve naturelle de Saint-Marin a coordonné Megara avec l’association Megaptera, présidée par Michel Vély, l’Agence territoriale de l’environnement de Saint-Barthélemy, l’association Mon école, ma baleine et le soutien du gouvernement d’Anguilla, qui a facilité l’obtention des autorisations pour la prospection sur son territoire marin. Ces cinq jours de mission ont réuni à bord d’un catamaran une quinzaine de participants dans les eaux de Saint-Martin, Anguilla et Saint-Barth. Bilan : 25 écoutes sous-marines dont 60% positives et 9 observations visuelles, permettant ainsi la localisation de 33 grands dauphins et 18 baleines à bosses. En dépit de l’état de la mer, agité, l’équipe à bord du canot semi-rigide a tout de même pu procéder à la pose d’une balise satellite - hélas restée muette - et au prélèvement de deux échantillons de peau, précieusement conservés au congélateur en attendant leur envoi vers l’Université de Groningen et sa base de données de plus de 8 500 biopsies pratiquées sur des baleines à bosse de l’Atlantique. La multiplication des missions Megara permet de capitaliser les données, les photos, les observations et les prélèvements ADN, qui restent restreints dans les Antilles françaises. Mais les premiers résultats laissent entendre que “nos” baleines sont en relation avec des populations également observées au sein des eaux du Cap Vert. Et le public pourra partager cette aventure grâce au travail d’un vidéaste embarqué à bord !

Herbier - Plant beds © Julien Chalifour
Herbier - Plant beds © Julien Chalifour

L’atelier - The workshop © Julien Chalifour

Mettre en commun les expériences. Et savoir ainsi ce qui se fait ailleurs. Mais aussi harmoniser les méthodologies et identifier les indicateurs. Cette démarche scientifique a été adoptée du 4 au 10 avril 2017 en Martinique, à l’occasion d’un atelier organisé par l’IFRECOR et des services en charge de l’application de la Directive Cadre sur l’Eau européenne, au sujet des récifs coralliens et des herbiers de phanérogames marines. Le but était bien évidemment de mieux connaître ces écosystèmes fragiles, afin de mieux les protéger. Julien Chalifour, en charge du pôle scientifique de la Réserve de Saint-Martin, a échangé avec ses pairs de la Caraïbe française, de l’Océan Indien et même du Pacifique - la Nouvelle-Calédonie était là - mais aussi avec des représentants du Global Coral Reef Monitoring Network (GCRMN), de l’IFRECOR, du ministère de l’Environnement, des services de l’État et de bureaux d’études intervenant pour le compte de l’État. Cette démarche tend à harmoniser les protocoles de collecte d’information, à concentrer toutes les données de suivi et permettre ainsi une meilleure prise en compte de l’état de santé des récifs et des herbiers à diverses échelles.

Fanny Kerninon, interlocutrice IFRECOR pour le suivi de l’état de santé des herbiers en outre-mer, débute une thèse dont l’objectif est de produire une boîte à outils “suivi des herbiers”. Elle a réalisé sa première mission dans le cadre de cette thèse à Saint-Martin où, avec le concours des agents de la Réserve, elle a lancé le protocole sur trois stations : le lagon de Tintamare, la baie du Galion à proximité de l’étang aux Poissons et enfin au Rocher Créole, station historique où la Réserve naturelle a m
Fanny Kerninon, interlocutrice IFRECOR pour le suivi de l’état de santé des herbiers en outre-mer, débute une thèse dont l’objectif est de produire une boîte à outils “suivi des herbiers”. Elle a réalisé sa première mission dans le cadre de cette thèse à

Fanny Kerninon, interlocutrice IFRECOR pour le suivi de l’état de santé des herbiers en outre-mer, débute une thèse dont l’objectif est de produire une boîte à outils “suivi des herbiers”. Elle a réalisé sa première mission dans le cadre de cette thèse à Saint-Martin où, avec le concours des agents de la Réserve, elle a lancé le protocole sur trois stations : le lagon de Tintamare, la baie du Galion à proximité de l’étang aux Poissons et enfin au Rocher Créole, station historique où la Réserve naturelle a mis en place un suivi scientifique depuis 2009. Trois plongées ont été réalisées sur chaque station, avec l’observation de plusieurs paramètres sur un couloir de 50 mètres de long : nombre de pieds d’herbier et présence éventuelle de fleurs, d’algues ou de différentes espèces d’animaux. Également, des sédiments et de l’eau ont été prélevés. La thésarde prévoit de rassembler toutes les connaissances disponibles et de tester le protocole standard, qu’elle contribue à améliorer.

La maîtrise des impacts anthropiques sur les espaces protégés

Opération contre la pollution aux hydrocarbures - A Plan To Fight Hydrocarbon Pollution

Que faire en cas de pollution aux hydrocarbures ? Qui agit et comment ? Une formation dispensée par des experts métropolitains et le service des Phares et balises de Guadeloupe a permis de transférer les compétences en cette matière à plusieurs acteurs locaux, qui sont aujourd’hui aptes à intervenir en apportant une réponse structurée et une équipe d’intervention constituée au cas où une nappe d’hydrocarbures menace les côtes de Saint-Martin. L’ensemble du personnel de la Réserve naturelle y a participé, aux côtés des gendarmes de la brigade nautique, de la SNSM, du personnel des deux marinas de Marigot et des services de la Collectivité. La préfecture et la Direction de la Mer ont coordonné les opérations depuis la cellule de crise créée pour l’occasion. La formation, théorique puis pratique, a porté sur le déploiement de barrages flottants constitués de pains de mousse synthétique, moins fragiles que les barrages gonflables, mais plus volumineux à stocker. Côté pratique, des barrages ont été testés avec succès à la sortie de la marina Fort Louis, mais avec plus de difficulté dans le chenal du pont de Sandy Ground, en raison d’un courant fort. À savoir : ce matériel sera stocké en Guadeloupe, mais certains exploitants de sites potentiellement à risques - dépôt de carburants, dont la centrale EDF - doivent détenir ce type de matériel.

Atelier en Martinique en avril 2017 Workshop in Martinique in April 2017
Atelier en Martinique en avril 2017 Workshop in Martinique in April 2017

Que deviennent les données stockées sur nos ordinateurs ? Où seront-elles dans 20 ans ? Et après ? Big question à laquelle l’IFRECOR et l’État ont apporté une réponse en ce qui concerne les récifs coralliens et les herbiers français. À l’issue de l’atelier organisé en Martinique en avril 2017 (lire l’article page 20), une formation technique a présenté un nouvel outil aux gestionnaires d’aires marines protégées. Cet outil géré par IFREMER permet de stocker et sécuriser toutes les données recueillies par chacun, mais aussi d’en faciliter l’échange et donc permettre une meilleure exploitation des connaissances, ainsi qu’une meilleure interprétation. Et tout cela au niveau national. La méthode est testée depuis un an à La Réunion et vient d’être lancée dans la région Caraïbe, où les données ne sont pas forcément les mêmes que dans la région indopacifique. Pour Julien Chalifour, cette avancée garantit que les résultats des suivis scientifiques menés depuis plusieurs années sur les fonds marins à Saint-Martin ne risquent pas d’être perdus et peuvent à présent être facilement partagés.

Trois petits poussins repérés sur le radeau aux terres Basses - Three baby birds seen on the raft in the Lowlands © Caroline Fleury
Trois petits poussins repérés sur le radeau aux terres Basses - Three baby birds seen on the raft in the Lowlands © Caroline Fleury

Nos lecteurs se souviennent sans doute que la Réserve avait mis à l’eau en octobre 2016 un radeau sur le Grand Étang, aux Terres Basses, afin de favoriser le repos et la nidification des petites sternes, au nombre de 75 sur le site. Le principe fonctionne très bien, excepté le fait que ce sont des échasses d’Amérique qui se sont appropriées l’embarcation en premier. Trois poussins ont été repérés aux jumelles par Caroline Fleury, chargée d’étude milieux terrestres et lacustres, qui a conçu et dessiné le radeau. L’expérience a prouvé ailleurs que plusieurs espèces pouvaient cohabiter sur un même radeau et la Réserve ne perd pas espoir que la petite sterne, dont l’espèce est protégée, se laisse séduire par cette nurserie, où ses oeufs seraient à l’abri d’une brusque montée des eaux ou de la gourmandise d’un rat ou d’autre animaux domestiques.

Rappel urgent : il est important de ne pas laisser divaguer les chiens aux abords des étangs, afin de protéger les nids et les poussins. La divagation des chiens est interdite par arrêté de biotope, sur le territoire de la Réserve naturelle et autour des étangs situés hors de la Réserve naturelle.

 

Actions de Police

La tortue blessée - The wounded turtle
La tortue blessée - The wounded turtle

Le dimanche 12 mars, un riverain informe la Réserve qu’une tortue caouanne est en danger sur la plage de Grandes Cayes, blessée par la flèche d’un fusil harpon. La Réserve aiguille l’animal vers la clinique vétérinaire de Hope Estate, qui prend en charge la tortue, retire la flèche et suture la plaie. Le reptile est ensuite remis à l’eau un peu plus tard dans la soirée. Sachant qui est le chasseur, la Réserve fait un procès-verbal de déclaration, suivi de l’audition du coupable par la gendarmerie. Le braconnier reconnaît les faits et raconte qu’à l’occasion d’un pique-nique sur la plage, un de ses amis ne mangeant pas de viande, il était tout spécialement allé tirer un poisson pour lui. Et là, manque de chance, une tortue passant malencontreusement dans le quartier avait reçu dans le cou la flèche destinée au poisson...

Les poissons saisis - The fish seized
Les poissons saisis - The fish seized

Saisies

Un filet de 100 mètres de long au Galion

La pêche est interdite dans la Réserve, mais cela n’empêche pas un braconnier de Quartier d’Orléans de régulièrement poser un filet de 100 mètres en baie du Galion. Conciliants, les gardes lui ont déjà demandé à quatre reprises d’arrêter cette pratique illégale, mais il persiste. Le 3 mars 2017, après qu’il ait menacé les gardes de prendre des informations sur eux et de les retrouver, il a fait l’objet d’un procès-verbal, que la Réserve naturelle a transmis à la brigade nautique.

Saisie d’un filet de 300 mètres

Le 13 mai 2017 vers 17h00, un témoin appelle la Réserve pour informer qu’un individu est en train de poser un filet à la sortie de la baie de Cul-de-Sac, en pleine réserve naturelle. Les gardes vérifient les faits depuis la terre et décident d’intervenir avant la nuit afin de limiter le nombre de poissons pris au piège. Ils ont constaté que le filet, long de 300 mètres, était déjà calé et l’ont relevé et saisi. Mais plusieurs poissons étaient déjà morts.

Double saisie pour deux pêcheurs

D’abord le 18 février à Grandes Cayes, puis à nouveau deux semaines plus tard au Rocher Créole, les gardes de la Réserve ont saisi les harpons de deux pêcheurs, ainsi qu’une trentaine de poissons à chaque fois. Ils ont été informés que la pêche était strictement interdite dans les eaux de la Réserve et avertis qu’un procès-verbal serait dressé à leur encontre s’ils récidivaient.

Photo IOTV
Photo IOTV

Fin avril 2017, un groupe de croisiéristes ayant loué des quads à Philipsburg n’a rien trouvé de mieux à faire que de traverser la passe peu profonde qui relie le site de l’observatoire aux baleines, sur la route de Coralita, à la petite île distante de 200 mètres. Immédiatement informée par des témoins choqués par cette intrusion sur un site protégé, la Réserve s’est tournée vers le loueur, qu’elle a déjà informé de la réglementation. Il s’est avéré qu’un sous-traitant avait fait appel à cette société, qui avait omis de lui transmettre les obligations à respecter dans la Réserve naturelle. La Réserve a identifié le loueur et a dressé un procès-verbal à son encontre. Le gérant de la société a depuis affiché la réglementation dans son espace de location.

La restauration des milieux et des populations dégradées

À la pêche au poisson-lion - Fishing lionfish
À la pêche au poisson-lion - Fishing lionfish

Le poisson-lion présent à Saint-Martin est-il ou non porteur de la ciguatera ? Deux chercheurs de l’Université de Guadeloupe ont procédé du 23 au 26 mai 2017 à des prélèvements in situ, avec l’aide logistique de la Réserve, et l’on attend les résultats. L’objectif des deux scientifiques était de capturer une trentaine de poissons de cette espèce invasive, sur des sites différents, afin d’effectuer des analyses sur la présence de ciguatera dans leur chair. Seize individus seulement ont pu être pêchés, la densité du poisson-lion étant bien inférieure à Saint-Martin à ce qu’elle est en Guadeloupe. Pourquoi ? Peut-être parce que cette espèce invasive a davantage de prédateurs à Saint-Martin. La Réserve a confié aux deux scientifiques une quinzaine de poissons-lions précédemment attrapés sur divers sites et stockés au congélateur.
Selon Julien Chalifour, en charge du pôle scientifique à la Réserve, la réponse risque d’être complexe, au regard des analyses déjà effectuées dans le passé par la Réserve. Non seulement le secteur de pêche et l’âge du poisson interviennent, mais le développement de la micro-algue à l’origine de la toxine dépend de plusieurs facteurs, pas toujours réunis : salinité et température de l’eau de mer, mais aussi les conditions du milieu, l’algue se développant au mieux sur le corail mort.

Destruction du centre équestre - Demolition of the equestrian
Destruction du centre équestre - Demolition of the equestrian

Comme annoncé dans notre précédente édition, le centre équestre du Galion rouvrira, dans le cadre d’un appel d’offres qui sera prochainement lancé au niveau régional et national. En attendant, le Conservatoire du littoral a décidé de raser le site existant et de transférer le centre équestre sur le site tout proche du refuge pour animaux, illégalement installé sur une parcelle classée en réserve naturelle. Le 10 juin, une société locale de travaux publics a démoli les anciens bâtiments et transporté les gravats, le bois et les métaux à l’écosite de Grandes Cayes, où ces matériaux ont été triés dans les règles de l’art.

Le perforateur sous-marin - The underwater drill
Le perforateur sous-marin - The underwater drill

17 bouées de mouillage tip top à Tintamare

Les 17 bouées de mouillage mises en place par la Réserve naturelle à Tintamare, dont certaines étaient endommagées, ont toutes été réparées. Les gardes attendaient de pouvoir disposer localement d’un perforateur sous-marin pour effectuer ces travaux, réalisés fin mai 2017.

De nouveaux panneaux, interactifs

L’été 2017 verra le remplacement de tous les panneaux informatifs de la Réserve naturelle. Les prochaines panneaux seront équipés d’un QR code qui permettra au public équipé de smartphones de se rendre directement sur le site internet de la Réserve naturelle de Saint-Martin.

L’optimisation des moyens pour assurer la qualité des missions

Bye bye Romain!
Bye bye Romain!

Arrivé à la Réserve naturelle en 2010, Romain Renoux quitte Saint-Martin pour Monaco, où il sera prochainement en charge de coordonner les fonds dédiés à l’ensemble des aires marines protégées (AMP) de Méditerranée, puis de la mise en place d’un mécanisme d’attribution de subventions en faveur de ces AMP. Son expérience au sein du projet européen BEST, qui comporte une belle similarité et dont il a été responsable pour le hub caraïbe de 2013 à 2017, lui sera très utile. Également correspondant du sanctuaire Agoa à Saint-Martin, il se félicite que l’ensemble des actions menées à Saint-Martin fasse l’objet d’une reconnaissance de l’ensemble des partenaires sur le rôle de “hub” que joue l’île dans la Caraïbe en matière de protection des océans et des mers. À l’heure du départ, il se remémore les moments forts qu’il a connus à Saint-Martin, dont la première convention de partenariat signée avec un établissement scolaire - le collège de Quartier d’Orléans - en 2010 ; l’aménagement du sentier de découverte de l’étang de la Barrière, avec le Conservatoire du littoral ; l’identification de 818 espèces marines lors d’une mission scientifique en avril 2012 et surtout la promotion de la coopération régionale, qu’il a mené dans tout le bassin caraïbe. “Il nous faut rester vigilants au quotidien pour la préservation du patrimoine naturel de Saint-Martin et garder intacte notre capacité à nous indigner lors des atteintes à l’environnement,” nous a-t-il confiés avant de partir.

36ème congrès des réserves de France - 36th conference for French Nature Reserves
36ème congrès des réserves de France - 36th conference for French Nature Reserves

300 personnes ont participé au congrès annuel des réserves naturelles de France (RNF), qui s’est tenu du 29 mai au 2 juin 2017, à Schoelcher, en Martinique. La Réserve de Saint-Martin était représentée par son directeur, Nicolas Maslach, accompagné de Julien Chalifour, en charge du pôle scientifique, et de Franck Roncuzzi, responsable du pôle Police de la nature. Cette grand-messe des réserves de France voit chaque année l’élection des bureaux et la constitution des différentes commissions. Ainsi, Franck Roncuzzi participe à la commission Police et personnel et Julien Chalifour à la commission scientifique. Et tous les trois font partie de la commission outre-mer, qui célébrait ses dix ans. L’événement a été l’occasion pour la Réserve de Saint-Martin d’échanger avec ses homologues de l’hexagone sur les problématiques communes et les chantiers en cours ou prévus, dont les enjeux dépassent le niveau local. La commission outremer a débattu de l’ensemble de ses compétences et s’est particulièrement intéressée aux mesures compensatoires qu’une réserve peut exiger d’un aménageur à l’occasion d’impacts à l’environnement. Elle a notamment réfléchi au type de compensations possibles et aux bonnes manières de les utiliser en faveur des espaces naturels. Un dernier atelier a réuni toutes les réserves afin de traiter du statut des gestionnaires : 60% des réserves étaient gérées il n’y a pas si longtemps des associations, mais ne sont plus que 40% aujourd’hui.

La communication et l’éducation environnementale

© Franck Roncuzzi
© Franck Roncuzzi

Une trentaine de lycéens de la Cité scolaire connaissent aujourd’hui l’îlet Pinel sur le bout des doigts. Le vendredi 19 mai, ils ont passé l’après-midi sur ce site idyllique, à terre et dans l’eau. À terre, ils ont bénéficié d’une visite guidée avec Ashley Daniel et Caroline Fleury, qui leur ont présenté la flore, leur ont expliqué la ponte des tortues marines sur la plage et les ont informés de la forte présence sur l’îlet de l’espèce invasive Iguana iguana, l’iguane commun qui supplante aujourd’hui l’espèce endémique Iguana delicatissima. Dans l’eau, Amandine Vaslet et Julien Chalifour ont pris le relais en leur dévoilant l’écosystème constitué par les herbiers, les récifs coralliens et la faune associée, que les jeunes étudiants ont pu découvrir avec leurs masques et leurs tubas. La sensibilisation des scolaires est une mission importante de la Réserve naturelle, à laquelle participent également les enseignants encadrant à l’initiative de cette sortie.

Nageoire caudale d’une baleine à bosse dans la Réserve naturelle de Saint-Martin - Caudal fin of a humpback whale in the Nature reserve of Saint Martin © Michel Vély
Nageoire caudale d’une baleine à bosse dans la Réserve naturelle de Saint-Martin - Caudal fin of a humpback whale in the Nature reserve of Saint Martin © Michel Vély

Conformément à son plan de gestion, le sanctuaire Agoa émet des recommandations et préconise les bons gestes lors de manifestations nautiques d’envergure, afin de réduire les impacts potentiels sur les mammifères marins et les risques de collision, de dérangement et de harcèlement. En 2017, cinq régates et de très nombreux bateaux ont bénéficié de ce soutien : la Heineken Regatta en mars avec 220 voiliers engagés ; la Bucket, à Saint-Barth, avec 40 grands voiliers, également en mars ; les Voiles de Saint-Barth, pendant laquelle 70 voiliers ont régaté en avril ; la Mini Bucket, en avril, avec 80 participants et enfin l’Hippocup en juin, qui a vu 32 voiliers régater entre Saint-Martin, Anguilla et Saint-Barth. Les organisateurs et les autorités locales compétentes sont sollicités et une fiche d’informations est glissée dans le dossier de course de chaque participant. Ce travail est rendu possible grâce au partenariat étroit qu’Agoa a su installer avec le nouveau directeur de la Mer de Saint-Martin, la préfecture, l’Agence territoriale de l’environnement de Saint-Barth et bien sûr la Réserve naturelle de Saint-Martin.

Le renforcement de l’intégration régionale

Vue sur le Marine Park d’Aruba - View of the Aruba Marine Park © Romain Renoux
Vue sur le Marine Park d’Aruba - View of the Aruba Marine Park © Romain Renoux

Créer une aire marine protégée. Voici le défi que s’est lancée l’île néerlandaise d’Aruba avec son tout récent Marine Park. Situé en bordure des dernières zones côtières préservées de cette île éminemment touristique, le Marine Park d’Aruba est situé dans la continuité du parc national terrestre Arikok, du Spanish Lagoon - zone humide classée RAMSAR - et de la plage de Mangel Halto. Le projet, porté par la Direction de la nature et de l’environnement au sein du gouvernement de cette île, bénéficie d’un financement du programme européen BEST en faveur des PTOM, à hauteur de 300 000 euros, sur un budget total de 350 000, de mai 2016 à avril 2019. Aruba a également reçu le soutien de BEST pour identifier le périmètre de cette zone de conservation de la biodiversité marine et élaborer son plan de gestion. Romain Renoux, coordinateur du projet européen BEST pour les îles de la Caraïbe, a été accueilli sur place par les acteurs de la création du Marine Park, du 20 au 22 février 2017, afin de constater avec eux l’avancée du projet, les inévitables difficultés rencontrées et les premiers résultats concrets. Venant de Saint-Martin, où la Réserve naturelle a été créée en 1998, il a pu rassurer ses hôtes sur le travail accompli, sans leur cacher les obstacles qu’ils rencontreront avant que le parc soit pleinement accepté par le public.

Les participants au Forum - Forum participants
Les participants au Forum - Forum participants

Chaque année, l’Union européenne invite les pays et territoires d’Outre-mer (PTOM) du monde entier à un grand Forum destiné à faire le point sur l’appui que l’Europe apporte et peut apporter à ces territoires. La dernière rencontre a eu lieu les 23 et 24 février 2017 à Aruba et a permis aux délégations venues de l’Atlantique, de la Caraïbe, du Pacifique, de l’Océan Indien et même des Terres australes de rencontrer les représentants de la Commission européenne et des quatre états membres (Danemark, France, Pays-Bas et Royaume-Uni). Romain Renoux, coordinateur du projet européen BEST pour les îles de la Caraïbe, était là bien sûr et a pu valoriser les actions concrètes de préservation de la biodiversité dans les douze PTOM de la Caraïbe, qui étaient tous représentés.

Mission de reconnaissance sur le terrain.
Mission de reconnaissance sur le terrain. De gauche à droite : Stuart Wynne (directeur du Department of Fisheries and Marine Resources), Janecka Richardson (gestionnaire du projet) et Élise Queslin (chargée de projet BEST, basée au CARSPAW) - Reconnaissan

Deux projets présentés par Anguilla ont été sélectionnés par le programme BEST et sont actuellement en cours de réalisation. Romain Renoux a rendu visite à ses voisins insulaires les 11 et 12 avril 2017 en compagnie d’Élise Queslin, chargée du projet BEST au Carspaw, afin d’évaluer l’avancée de ces projets.

Premier projet : protéger les tortues marines d’Anguilla

Une plage restée naturelle, idéale pour la ponte des tortues marines - An undeveloped beach, an ideal place for sea turtles to lay their eggsAnguilla s’inquiète pour ses tortues marines, dont les populations ont considérablement décliné en raison de leur surexploitation, comme partout ailleurs dans la Caraïbe. Afin d’inverser cette tendance, le Department of Fisheries and Marine Resources d’Anguilla s’est fixé cinq objectifs, à développer entre mai 2016 et avril 2019 :

  •  Identifier et évaluer les populations de tortues marines, ainsi que les sites qu’elles fréquentent.
  •  Identifier les menaces dont elles sont victimes et élaborer des stratégies pour les contrer.
  •  Définir et mettre en place le cadre et les actions nécessaires à la protection des tortues marines et au développement de leurs populations.
  •  Apporter une expertise technique accrue au niveau local pour la protection des tortues marines et le renforcement des connaissances à leur sujet.
  •  Mieux sensibiliser le public, localement et à l’extérieur, sur l’importance de la protection des tortues marines et du littoral.

Il va s’agir entre autres de former une vingtaine de guides - parmi lesquels des pêcheurs - à la pratique d’écotours autour et au sujet des tortues marines. D’un montant total de 440 000 euros, ce projet est financé par BEST à hauteur de 400 000 euros.

Second projet : préserver l’iguane des Petites Antilles

Iguane des Petites Antilles - Lesser Antillean IguanaL’iguane des Petites Antilles - Iguana Delicatissima - est en voie de disparition, supplanté par l’iguane commun - Iguana Iguana - espèce invasive avec laquelle il s’accouple et qui finit après quelques décennies par faire disparaître l’espèce endémique. Anguilla a la chance que l’iguane des Petites Antilles n’ait pas encore totalement disparu sur son sol, comme c’est le cas aujourd’hui à Saint-Martin, et devait réagir rapidement pour préserver ce précieux patrimoine naturel. La solution est radicale : il faut isoler l’animal sur une île suffisamment éloignée d’autres terres, pour la rendre inaccessible à l’iguane commun, qui est très bon nageur. La capture d’Iguana Delicatissima a commencé et il faut d’abord s’assurer par un test génétique que l’animal n’est pas un hybride. Seul un test génétique peut le certifier à 100%, les caractéristiques morphologiques étant parfois trompeuses. Les reptiles sont donc placés dans un enclos en attendant les résultats du test et si tout va bien font ensuite l’objet d’une translocation à Prickly Pear, où aucun iguane commun n’a été repéré. Une étude en cours s’intéresse au transfert des iguanes, à l’évolution de leur population sur leur nouvelle île, leur reproduction, leur régime alimentaire, leurs conditions de vie et a conclu que pour le moment toutes les conditions étaient réunies pour que l’Iguana Delicatissima prospère à Prickly Pear. Les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Eustache, où l’iguane des Petites Antilles est également menacé par l’iguane commun, sont partenaires au travers de l’Agence territoriale de l’environnement et de la Stenapa (Statia National Parks Foundation).

Les participants à l’atelier - Workshops participants
Les participants à l’atelier - Workshops participants

Michel Vély expose les résultats de Megara - Michel Vély presents the results of MegaraNous vous parlions en avril dernier du projet de mise en réseau d’aires marines protégées des pays limitrophes de l’Océan Atlantique, Nord et Sud. Portée par la Commission européenne, l’idée a vu le jour après que Romain Renoux, coordinateur du projet européen BEST pour les îles de la Caraïbe et représentant du sanctuaire Agoa de protection des mammifères marins à Saint-Martin, ait présenté à Bruxelles les actions menées par Agoa et la Réserve naturelle dans le cadre de la mission Megara, sur les corridors de migration des baleines à bosse, qui ne connaissent pas les frontières. Séduite, la commission européenne avait décidé de financer la mise en place d’ateliers de travail avec les aires marines protégées déjà impliquées sur ces sujets, mais aussi avec les pays désireux d’améliorer leurs connaissances au sujet de ces corridors de migration. Et c’est ainsi que le premier atelier s’est tenu du 15 au 17 mai à Saint-Martin, au Beach hôtel. Saint-Martin, Sint Maarten, Saint-Barth, la Guadeloupe, la Martinique, les Bermudes, Les États-Unis, les Pays-Bas et le Cap Vert ont ainsi pu partager leurs expériences et leurs connaissances. Tous ces territoires reliés par les couloirs de migration des baleines à bosse sont bien conscients qu’il est important que chaque pays fasse son travail de protection pour une protection efficace des grands mammifères marins. Pour Saint-Martin, Julien Chalifour, en charge du pôle scientifique de la Réserve, et Michel Vély, président de l’association Megaptera, ont exposé ensemble les résultats des trois missions Megara réalisées en 2014, 2015 et 2017, faisant valoir ainsi l’importance de la zone de reproduction.

Best, Voluntury Sceme for Biodiversity and Ecosystem Services in Territories of European Overseas
Best, Voluntury Sceme for Biodiversity and Ecosystem Services in Territories of European Overseas

Le programme européen BEST a lancé son troisième et dernier appel à projets en faveur de la biodiversité des PTOMs de la Caraïbe et en a présélectionné huit. Le montage des dossiers pouvant s’avérer complexe, un atelier de renforcement des capacités a été organisé à Saint-Martin les 15 et 16 juin au Beach Hôtel de Marigot afin de former et d’accompagner les candidats, avant la remise de leur dossier final. Anguilla a participé, aux côtés de Bonaire, des Bermudes, des îles Cayman, de Curaçao, de Saint-Barthélemy, de Sint Maarten et des Turks & Caicos. Ce sera à un comité d’experts d’évaluer les propositions, et à la Commission européenne de retenir les meilleures.

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