Favoriser la conservation des récifs coralliens et des espèces associées

Favoriser la conservation des récifs coralliens et des espèces associées

Favoriser la conservation des récifs coralliens et des espèces associées

Acropora blanchi fin 2023 | Acropora bleached by the end of 2023
Acropora blanchi fin 2023

Action CS2 – Réaliser le suivi et l’évaluation de l’état de santé des communautés benthiques récifales

Action MS 39 – Participer à des colloques régionaux, nationaux et internationaux

Du 18 au 22 septembre 2023, l’Initiative française pour les récifs coralliens (IFRECOR) a orchestré une rencontre à Saint-Barthélemy, appuyée par l’Agence Territoriale de l’Environnement (ATE). Cette assemblée a mobilisé des représentants des services de l’État des Antilles françaises et des spécialistes des milieux coralliens, dans le but d’examiner l’état des récifs coralliens, les stratégies de conservation et les avancées scientifiques. Les discussions ont également porté sur les défis émergents, tels que les maladies coralliennes, les perturbations climatiques et les récents épisodes de blanchissement des coraux.

En août 2023, la Martinique et la Guadeloupe ont été témoins d’un blanchissement corallien d’une ampleur inégalée depuis 2005, phénomène qui s’est étendu quelques semaines plus tard à Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Ce blanchissement, qui se manifeste lorsque les températures de l’eau excèdent 30°C, dépend de l’intensité et de la durée de cette hausse thermique. Les récifs coralliens des Antilles françaises ont donc enduré en 2023 un épisode majeur de blanchissement. Déjà éprouvés par une épidémie en 2019-2020 et par une maladie affectant les oursins diadèmes, défenseurs essentiels contre les macro-algues envahissantes, les coraux sont aujourd’hui encore plus vulnérables aux stress environnementaux. Plus précisément, la zooxanthelle, micro algue symbiotique et source d’énergie vitale pour les coraux, devient déficiente et même toxique sous l’effet du blanchissement. La bonne nouvelle – bien qu’aucune évaluation de l’impact réel de cet épisode n’ait été réalisée – reste que des observations ponctuelles au sein de la réserve naturelle de Saint-Martin révèlent un taux encourageant de rétablissement des coraux affectés, contrastant avec les situations observées en Martinique et en Guadeloupe. Il apparaît que la brièveté de la hausse des températures dans les eaux des Îles du Nord a pu modérer les conséquences du phénomène. Cet atelier technique de spécialistes a permis d’initier de nouvelles collaborations, notamment avec une experte algologue. Son expertise sera sollicitée en 2024 pour enrichir l’inventaire des algues marines des fonds de Saint-Martin et Saint-Barthélemy. L’Office Français de la biodiversité (OFB) a été sollicité pour le financement de cette mission.

Après avoir organisé des prospections sous-marines pour confirmer ces signalements de blanchissement, l’Association de Gestion de la Réserve Naturelle de Saint-Martin (AGRNSM) a décidé de solliciter le fonds IFRECOR dédié afin de mettre en oeoeuvre une nouvelle évaluation de l’impact de l’événement, grâce à l’intervention d’un bureau d’études spécialisé. Une procédure de mise en concurrence a été diligentée pour sélectionner un bureau d’études expert en la matière et la réserve était en fin d’année dans l’attente de la sélection par les services de l’Etat de la proposition de services retenue. L’objectif : quantifier le phénomène et évaluer ses impacts sur les récifs de l’ile. Cette démarche de l’AGRNSM souligne l’engagement de l’association de gestion de la réserve naturelle comme porteur de projets locaux, pour faire face aux changements globaux, en collaboration avec les instances impliquées dans la conservation des récifs coralliens et des écosystèmes associés.
Bateaux au mouillage au rocher Créole | Boats at anchor at Creole Rock
Bateaux au mouillage au rocher Créole | Boats at anchor at Creole Rock

Action CS3 – Développer et tester la réhabilitation corallienne et espèces associées (priorité 2)

Action IP6 – Contribuer à la réhabilitation des récifs coralliens et des herbiers

Action PR2 – Développer et valoriser les collaborations scientifiques (priorité 1)

Faisant suite à un appel à projet initié et financé par l’Office français de la biodiversité (OFB) pour l’atténuation des pressions anthropiques subies par les récifs coralliens, les herbiers et les mangroves, le projet ReCorEA Saint-Martin est piloté par l’AGRNSM, avec Clément Bonnardel à sa tête. Ce projet ambitieux peut également compter sur le soutien financier d’Atout France et de la Fondation Véolia. Les travaux prévoient quatre phases :

  • L’actualisation de la cartographie par l’analyse d’images satellites, assortie d’une enquête sociologique auprès des utilisateurs de la zone et d’une évaluation quantitative de la fréquentation nautique en réserve.
  • La révision et le renforcement du parc de mouillages à usages encadrés.
  • Une évaluation des retombées du projet par le suivi de l’état de santé des écosystèmes bénéficiaires.
  • l’appui à l’émergence de comportements écoresponsables, par la mise en place d’actions de sensibilisation du public et des scolaires, ainsi que l’animation de chantiers de restauration participatifs, pour la conservation des mangroves.

Au terme de l’année 2023, les données collectées sur le terrain par l’AGRNSM ont permis d’apprendre à l’intelligence artificielle, développée par son prestataire iSea, à reconnaitre et cartographier les habitats naturels à partir d’images satellites. Une version de travail a pu être livrée en fin d’année. Cette première ébauche nécessite des corrections pour mieux discriminer les différentes catégories de milieux retenues par les partenaires. L’analyse de ces mêmes images satellites permet également d’identifier les zones les plus fréquentées par les bateaux et de connaître leur taille. Ces informations s’avèreront essentielles pour élaborer des propositions d’architecture et de dimensionnement de la future stratégie de mouillage en réserve. Parallèlement, une douzaine de professionnels de la mer ont fait part à Clément Bonnardel de leurs avis concernant les infrastructures déjà présentes en réserve. Où y a-t-il des mouillages ? Les utilisent-ils ? Les estiment-ils sûrs ? Répondent-ils à leurs besoins ? L’enquête se poursuit auprès des professionnels, mais également des plaisanciers et institutions comme la DEAL, la Direction de la mer ou la Brigade nautique. Le début du déploiement du nouveau parc est planifié pour l’été 2024. L’analyse des images satellites a également produit d’intéressants résultats quant au dessin du trait de côte, en permettant de comparer des photos aériennes datant de février 2017 avec des images prises en janvier 2023. Borné par la limite de la végétation ou par les constructions, ce trait de côte a reculé d’une trentaine de mètres sur certains sites, mais aussi avancé de quelques mètres sur de rares autres.

Catamaran Dream Yacht échoué en décembre 2023 à Grandes Cayes
Catamaran Dream Yacht échoué en décembre 2023 à Grandes Cayes

Action IP4: Extraire les macrodéchets

Action IP5: Assurer une veille et intervenir suite à des rejets anthropiques

Les fêtes de Noël ont été quelque peu bouleversées dans la réserve naturelle de Saint-Martin, avec l’échouage d’un catamaran de charter sur les récifs de Grandes Cayes aux alentours de midi, le 24 décembre. Le skipper, qui naviguait seul, a rapporté une défaillance mécanique sur son catamaran Bali de 54 pieds (16,4 mètres) alors qu’il faisait route depuis Antigua vers la marina d’Anse Marcel. L’équipe de gestion de la réserve a pu constater que le bateau avait franchi la première barrière de corail et reposait sur la seconde rangée. Une première plongée d’inspection révélait que les deux hélices avaient disparu, ainsi que les deux ailerons de quille, et qu’il existait une voie d’eau. Il devint très vite évident que l’enlèvement au moyen d’un tractage depuis la terre était la seule solution possible. La société partenaire et propriétaire du navire s’est associée les services d’entreprises spécialisées en concertation avec le gestionnaire, pour élaborer une méthodologie favorable à un enlèvement rapide de l’épave, afin de limiter les impacts sur la barrière coralienne et d’éviter une sur-pollution. Les opérations planifiées ont été soumises et validées par les services locaux de la DEAL et les agents de l’AGRNSM étaient présents sur site pour s’assurer de la bonne conduite du chantier. Une fois le carburant pompé hors des réservoirs, l’épave a pu être tractée à terre et le bateau démâté. Un gardiennage continu a évité le pillage du navire. En fin d’année, l’épave sécurisée et consolidée a été remise à l’eau sur une zone proche et adéquate pour être tractée vers un chantier de dépollution et déconstruction.

Des échanges auront lieu début 2024 pour établir la marche à suivre pour assurer la réparation des milieux terrestres et marins successivement impactés par l’accident et l’évacuation de l’épave. Le préjudice environnemental a d’ores et déjà été évalué et documenté par les équipes de gestion avec l’appui des services de la DEAL à Saint-Martin.

Réunion du comité de pilotage du Life BIODIV’OM | Steering comittee meeting of the Life BIODIV’OM
Réunion du comité de pilotage du Life BIODIV’OM | Steering comittee meeting of the Life BIODIV’OM

Action IP4 : Développer et tester la réhabilitation coralienne et espèces associées

14 Favoriser la conservation des récifs coralliens e et des espèces associées Réserve Naturelle SAINT MARTIN Le projet européen Life BIODIV’OM pour Saint- Martin touche à sa fin. Consacré à la restauration du mérou de Nassau et du mérou géant, il a fait l’objet de comités de suivi réguliers, dont le dernier s’est tenu le 7 décembre par visioconférence. Il a réuni Amandine Vaslet, docteur en ichtyologie ; Margot Mesnard, experte en développement durable ; Alexina Paya, experte en environnement marin et Hadrien Bidenbach, gestionnaire du projet One Shark SXM. Le lendemain, le comité de pilotage du Life BIODIV’OM s’est déroulé en visioconférence, animée par Aude Berger, cheffe du projet depuis son lancement en 2018. Elle a présenté l’avancement et l’évolution des actions menées. Y ont participé les membres du bureau de l’association de gestion de la réserve naturelle de Saint-Martin (AGRNSM) ainsi que plusieurs établissements publics : préfecture, DEAL, direction de la Mer, collectivité de Saint-Martin, brigade nautique de gendarmerie, responsable de l’association Les Fruits de mer, Agence territoriale de l’environnement de Saint-Barthélemy (ATE) et Agence régionale de la biodiversité de Guadeloupe (ARB).

Ces coraux cornes d’élan en pleine santé ne sont plus qu’un souvenir à Petite-Terre | These healthy elk horn corals are now just a memory at Petite-Terre
Ces coraux cornes d’élan en pleine santé ne sont plus qu’un souvenir à Petite-Terre | These healthy elk horn corals are now just a memory at Petite-Terre

Action MS1 : Participer au suivi des biocénoses marines dans le cadre du réseau des réserves

Julien Chalifour a apporté son soutien à l’équipe de gestion de la réserve naturelle nationale des îlets de Petite-Terre, en Guadeloupe, en participant au suivi annuel de l’état de santé de ses récifs et de ses herbiers. La mission de cette année, qui s’inscrit dans un partenariat de longue date, a également bénéficié de l’expertise de Sébastien Gréaux de l’Agence territoriale de l’environnement de Saint-Barthélemy. Cette mission était coordonnée et pilotée par les ingénieurs spécialistes du bureau d’étude Créocéan. Les plongées ont permis de mesurer l’ampleur du récent blanchissement corallien en Guadeloupe, avec notamment l’observation de la mortalité d’un grand nombre de colonies historiques de coraux cornes d’élan, Acropora palmata.

Plongée sur un massif de corail
Plongée sur un massif de corail

Action CS1, CS3, PR2 et IP6

  • Actualisation de la cartographie
  • Développer et tester la réhabilitation corallienne et espèces associées (priorité 2)
  • Contribuer à la réhabilitation des récifs coralliens et des herbiers
  • Développer et valoriser les collaborations scientifiques (priorité 1)

Attributaire du projet ReCorEA lancé par l’Office français de la biodiversité (OFB) pour la résilience des récifs coralliens et leurs écosystèmes associés (herbiers et mangroves), la réserve naturelle a recruté Clément Bonnardel au poste de chef de ce projet, dont la priorité réside dans la révision et le renforcement du parc mouillages et d’équipements légers (ZMEL). Il est prévu en quatre phases.

Phase préliminaire

Il s’agit de mettre à jour la cartographie des zones terrestres et maritimes de la réserve, qui date du début des années 2000, mais aussi de créer celle des zones adjacentes, en dehors de la réserve : Grand-Case, Anse Marcel, Cul-de-Sac et la baie Orientale... La cartographie des habitats terrestres et sous-marins s’appuie sur un processus de reconnaissance automatisée par ordinateur à partir d’images satellite. Pour cela, le prestataire i-Sea fait appel à des relevés de terrain actuels mis en oeoeuvre par le chef de projet et l’ensemble de l’équipe de gestion, afin de caractériser et de localiser un échantillon robuste des habitats présents : sable, mangrove, récif corallien, herbier... Ces nouvelles cartes vont aussi permettre de suivre la fréquentation nautique de ces espaces, l’évolution du trait de côte, ainsi que l’existence de panaches turbides d’eau troublée par des rejets de ravines ou d’eaux usées, diverses pollutions ou due à la décomposition de sargasses.

Parallèlement, le chef de projet enquête auprès des professionnels de la mer, plaisanciers et pêcheurs, afin d’appréhender leur perception et leurs besoins en matière de fréquentation de la réserve et de mouillages. La fréquentation nautique actuelle est également caractérisée en direct sur site par un suivi du nombre d’embarcations par classe de taille et catégories d’activités.

L’objectif est de définir une stratégie fruit d’un compromis entre conservation des habitats, capacité d’accueil des usagers de la mer (commerciaux et plaisanciers) et encadrement raisonné des usages.

Phase de gestion

Fruit de ce de travail préparatoire, le déploiement du nouveau parc de mouillages pourra être opéré : renforcement de l’existant et implantation de nouvelles zones. Il s’accompagnera de la mise en oeoeuvre d’un cadre réglementaire concernant les usages sur l’ensemble de l’espace protégé, pour garantir l’efficacité de l’approche et la conservation des habitats marins.

Phase de suivi

Avant, pendant et après déploiement du parc de mouillages, divers suivis seront opérés pour évaluer l’état initial et l’évolution de l’état de santé des 3 principaux habitats concernés par le projet ReCorEA : mangroves, herbiers sous-marins et communautés coralliennes. Il sera ainsi possible d’évaluer et de suivre dans le temps l’efficacité du dispositif.

Phase de sensibilisation

Essentielle, cette sensibilisation a déjà démarré, notamment lors de “La journée pour les oubliés des vacances” organisée par le Secours populaire, qui a permis à 300 enfants de Saint-Martin, Sint Maarten, Anguilla et de la Guadeloupe de découvrir avec la réserve la richesse écologique de la baie de l’Embouchure. Elle se poursuit et se poursuivra dans l’ensemble des établissements scolaires saint-martinois. L’enjeu est d’initier une prise de conscience quant à la richesse et la fragilité de ces écosystèmes indispensables, pour faciliter l’acceptation et l’adhésion à de nouvelles mesures de gestion des usages au sein de la réserve naturelle nationale de Saint-Martin. Financé par l’OFB, le projet ReCorEA reçoit également le soutien de la Fondation Véolia Environnement et d’Atout France.

Âgé de 25 ans, Clément Bonnardel, chef du projet ReCorEA, est titulaire d’un master international en biologie de la conservation des espèces et s’est spécialisé en écologie comportementale et gestion de la faune. Multilingue, il a bénéficié d’une année d’échange au Nebraska et de deux stages en Espagne, consacrés à l’étude de l’aigle de Bonelli et à son territoire. Il est plongeur scaphandrier de niveau 2B et détient un permis côtier.
Enquête auprès d’un professionnel
Enquête auprès d’un professionnel

Action CS3, IP6 et PR2

  • Développer et tester la réhabilitation corallienne et espèces associées (priorité 2)
  • Contribuer à la réhabilitation des récifs coralliens et des herbiers
  • Développer et valoriser les collaborations scientifiques (priorité 1)

Deux membres du Groupe d’étude et de protection des oiseaux en Guyane (GEPOG) sont venus prêter main forte à l’équipe de gestion de la réserve naturelle du 22 au 29 avril 2023 afin d’atteindre deux objectifs du programme LIFE BIODIV’OM.

Le premier de ces objectifs a consisté en un transfert de savoir-faire entre Guyanais et Saint-Martinois, concernant le dialogue territorial, les pratiques de concertation, médiation et négociation sur des questions environnementales et territoriales, en l’occurrence le mérou géant et le mérou de Nassau. Le second concernait la réalisation d’enquêtes auprès de professionnels concernés en rapport avec les mérous. Les personnes rencontrées se sont vues remettre différents supports de communication relatifs à l’enjeu du programme LIFE BIODIV’OM en cours à Saint-Martin. Onze réunions bilatérales ont eu lieu, avec 16 acteurs du monde socioéconomique de l’île : pêcheurs professionnels et de loisirs, clubs de plongée, opérateurs touristiques, restaurateurs...

L’équipe locale est sortie enrichie de ce compagnonnage avec la Guyane, où elle se rendra dans quelques semaines, à l’occasion de la réunion plénière avec tous les acteurs, qui décideront d’un commun accord de la meilleure politique de gestion des mérous.

Projet ReCorEA : protéger les coraux et écosystèmes associés

La réserve naturelle a remporté l’appel à projet lancé par l’Office français de la biodiversité (OFB) pour la résilience des récifs coralliens et leurs écosystèmes associés (herbiers et mangroves). Baptisé ReCorEA, ce projet vise à atténuer les pressions subies par ces trois écosystèmes côtiers. Le projet proposé par la réserve naturelle s’attache à évaluer et limiter les impacts issus de la terre par la restauration de la mangrove, d’une part, mais aussi les impacts liés à la fréquentation nautique d’autre part, par le renforcement des parcs de mouillages - au Rocher Créole, à Tintamarre et à Pinel - accompagné d’une nouvelle stratégie de gestion et d’un règlement d’usage. L’objectif de ce programme, qui s’appuiera sur la mise à jour de la cartographie des habitats côtiers et le suivi de l’état de santé de 3 écosystèmes cibles de la réserve naturelle, consiste à proposer des actions de restauration de mangroves, un redéploiement de zones de mouillages et d’équipements légers (ZMEL), protégeant les herbiers et les communautés coraliennes. Ces actions, prévues pour 2023 et 2024, seront pilotées au sein de la réserve et dans sa périphérie immédiate par un chef de projet nouvellement recruté. Financé par l’OFB, le projet ReCorEA reçoit également le soutien de la Fondation Véolia Environnement et d’Atout France.

Le mérou géant The giant grouper

Life BIODIV’OM : compagnonnage avec la Guyane
Dans le cadre du LIFE BIODIV’OM, une collaboration étroite s’opère entre le groupe d’étude et de protection des oiseaux en Guyane (GEPOG) et le gestionnaire de la Réserve naturelle de Saint- Martin, pour l’émergence de solutions efficaces et concertées pour la conservation du mérou géant. Par le biais d’échanges en distanciel et de la venue prochaine d’une salariée du GEPOG à Saint- Martin, l’AGRNSM bénéficie des retours d’expérience de Guyane pour mettre en oeuvre des travaux de concertation et de sensibilisation des usagers locaux pour une meilleure prise en compte des mérous. L’objectif est d’aboutir à la mise en place de mesures de gestion de ce maillon essentiel de la biodiversité, également reconnue comme vecteur du développement économique local.

Participation au second séminaire du programme Life BIODIV’OM

Le second séminaire du programme Life BIODIV’OM a eu lieu en Guyane du 19 au 23 septembre 2022, sur le thème du dialogue territorial et des sciences participatives. Tous les acteurs et bénéficiaires du Life BIODIV’OM étaient présents... exceptés Aude Berger et Vincent Oliva, coincés à Saint-Martin pour cause de perturbations du trafic aérien en lien avec une météo très capricieuse. Fort heureusement, tous deux ont pu participer à tous les échanges par visioconférence.

Le lien sur la vidéo du séminaire : https://www.lifebiodivom.fr/images/videos 

Réunion du comité de suivi Meeting of the steering committee
Réunion du comité de suivi Meeting of the steering committee

Nouvelle validation du Life BIODIV’OM

Le 1er décembre, le comité de suivi du programme Life BIODIV’OM s’est réuni une nouvelle fois dans les locaux de la réserve naturelle, à Hope Estate. Ces experts scientifiques ont pris connaissance du bilan des avancées et des actions du programme, avant de valider la stratégie mise en place. Cette instance consultative a pour but d’évaluer les approches et résultats des actions développées et mises en oeuvre par l’AGRNSM à Saint-Martin, afin de proposer des solutions adaptées au contexte local, pour s’assurer de la réussite du LIFE BIODIV’OM à Saint-Martin (atteinte des objectifs fixés et conservation des espèces cibles). Ce programme s’inscrit dans le prolongement des actions fixées par le Plan de gestion de la Réserve naturelle de Saint-Martin (Favoriser la conservation des biocénoses marines d’importance patrimoniale : récifs coralliens et herbier de phanérogames marines).

Delphine Morin & Aude Berger
Delphine Morin & Aude Berger

La LPO en visite à Saint-Martin

Du 7 au 9 décembre, Delphine Morin, coordinatrice du projet Life BIODIV’OM pour la LPO, avait rendez- vous avec la réserve naturelle. Cette visite a été pour elle l’occasion de constater la situation sur le terrain et de réaliser le bilan des actions menées. Elle est également venue évoquer avec l’équipe de gestion l’éventualité d’une demande de prolongation du LIFE BIODIV’OM à l’Europe, sollicitée par l’ensemble des autres contributeurs du programme, excepté par l’AGRNSM. Cette question est actuellement débattue en interne et avec la LPO, quant à ses conséquences et modalités techniques et financières.

Avancée du projet Biodiversity Nursery

La restitution des actions soutenues financièrement par la Fondation de France à Saint-Martin - parmi lesquelles la restauration du site de la pépinière de palétuviers en bordure des Salines d’Orient - a eu lieu le 27 octobre 2022. Cette présentation a été l’occasion pour la réserve naturelle d’annoncer l’avancée du projet Biodiversity Nursery. Parti de la pépinière créée par la réserve pour reconquérir les espaces naturels et restaurer les zones humides mises à mal par le cyclone Irma, ce projet va s’étendre autour de la pépinière. Il va s’agir de restaurer les zones humides historiquement comblées pour le passage de la route, afin de les reconnecter entre elles, de créer des îlots, d’y planter des pousses de palétuviers et finalement de créer un sentier de découverte sur pilotis et une plateforme d’observation des oiseaux pour le public.. La réserve naturelle a d’ores et déjà reçu toutes les autorisations administratives nécessaires au lancement de ces travaux de renaturation et de mise en valeur d’un site dégradé depuis de trop nombreuses années.

Sylvère Robin, 23 ans, en année de césure entre son Master 1 et son Master 2, a choisi de devenir ingénieur agronome spécialisé en halieutique. Il étudie à l’Agrocampus Ouest de Rennes et a une qualification de plongeur professionnel. à la réserve naturel

Deux projets dans le programme France relance

Deux programmes proposés par la réserve naturelle ont été retenus dans l’opération France Relance, financée par l’Etat et l’Europe sur un an. Le premier projet a vu l’immersion d’habitats artificiels de type “Biohut” dans les infrastructures portuaires marines de Saint-Martin. Sylvère Robin, stagiaire à la réserve entre février et juillet 2022, a eu pour mission de gérer ce projet d’installation de nurseries artificielles, afin de favoriser la recolonisation de ces espaces par la faune sous-marine. Il a travaillé en collaboration avec les exploitants du port de Galisbay, de la marina Fort Louis et de la marina de l’Anse Marcel, qui ont tous approuvés le projet. Un linéaire de 6 Biohut a été immergé à Galisbay et deux linéaires de 6 Biohut, à l’Anse Marcel et à Fort Louis. Les structures sont fournies par la société Ecocéan, spécialiste de la restauration écologique en milieu aquatique, présente sur l’île en juillet 2022 pour le montage et la pose de ces Biohut, intégrant des coquilles vides de lambis. Ces habitats artificiels font office de nurseries et sont destinés à accueillir des poissons et des crustacés à leurs tous premiers stades de vie, pour en augmenter les chances de survie à ce stade critique. Un état initial des sites a été établi avant la pose et permettra la comparaison lors du premier suivi, prévu en octobre.

Voir le second projet France Relance concernant la régulation des petits rongeurs en page 19.

Le lambi, que l’on a tendance à imaginer sédentaire, peut se déplacer sur plusieurs kilomètres, à raison d’un kilomètre par jour et être présents jusqu’à 100 mètres de profondeur. Par ailleurs, ses larves sont emportées par les courants, ce qui complique encore la mission de l’OFB.
Le lambi, que l’on a tendance à imaginer sédentaire, peut se déplacer sur plusieurs kilomètres, à raison d’un kilomètre par jour et être présents jusqu’à 100 mètres de profondeur. Par ailleurs, ses larves sont emportées par les courants, ce qui complique

Une mission pour lutter contre le trafic de lambis

Présent une première fois à Saint-Martin en 2020, Julien Lopez Pardo, agent de l’OFB (Office français de la biodiversité), a rendu de nouveau visite à la réserve naturelle en avril 2022 afin de présenter les premiers résultats de son travail. Sa mission, liée au trafic de lambis dans la Caraïbe, est basée sur le développement d’un outil qui aiderait la police à déterminer la provenance de cette espèce protégée et en voie de disparition, dont la pêche et l’importation sont réglementées en France. Ce qui alimente un trafic ciblé par les douaniers et les inspecteurs de l’Environnement. L’idée du projet est de voir s’il existe une empreinte-type, génétique ou isotopique (basée sur la signature énergétique des atomes), propre aux populations de lambis de chacune des îles françaises. Il s’avère que l’empreinte des premiers échantillons collectés à Saint-Martin et Saint-Barthélemy se démarque bien, ce qui n’est pas le cas en Martinique et en Guadeloupe, où les empreintes se chevauchent et ont tendance à ne pas être distinguables. Les travaux se poursuivent donc afin d’affiner les résultats et confirmer que la création de cet outil de contrôle est effectivement viable.

Bateaux à l’ancre à l’îlet Pinel – Boats anchored in Pinel
Bateaux à l’ancre à l’îlet Pinel – Boats anchored in Pinel

Des mouillages écologiques en faveur des récifs coralliens

Le Pôle scientifique de la réserve s’est attelé durant l’été 2022 à peaufiner avec l’aide de Fleur Wintzer, un projet retenu dans un premier temps par l’Office français de la biodiversité (OFB) et qui vise à renforcer le parc de mouillages écologiques - sur les sites du Rocher Créole, de Tintamarre, de Pinel et de Caye Verte - et le balisage maritime de la réserve. Ce programme avait préalablement été soumis à l’OFB par la réserve, dans le cadre de l’appel à projets ReCorEA de réhabilitation des récifs coralliens et des écosystèmes associés. Il a été soumis pour un second examen plus détaillé au jury ReCorEA : diagnostic préparatoire sur les milieux fréquentés par les bateaux, définition d’une stratégie de déploiement de zones de mouillages et d’équipements légers (ZMEL), action de sensibilisation pour une meilleure acceptation par les usagers sont au programme. Ce dernier s’inscrit en parfaite cohérence avec la démarche initiée par l’Etablissement portuaire de Saint-Martin, dans le cadre de la mise en place de ZMEL dans les baies de Marigot et de Grand-Case. Le 8 septembre, Julien Chalifour a défendu ce projet validé en Conseil de gestion présidé par le Préfet, par visioconférence devant le jury ReCorEA. Ce dernier a une nouvelle fois reçu l’adhésion des membres, qui n’ont soulevé que peu de questions et simplement invité à une modification mineure pour en faciliter l’acceptation.

Dans le cadre de la définition de cette stratégie de renforcement des équipements d’accueil des plaisanciers et des professionnels de la mer, des études préliminaires sont prévues pour alimenter la réflexion. La première consiste en une mise à jour de la cartographie des habitats sous-marins et terrestres de la réserve, en intégrant les zones proches de cette dernière : Grand-Case, Anse Marcel, Cul-de-Sac et Baie Orientale. Sont également envisagées une analyse des flux de navires au sein de ces parcs, une étude des panaches d’eau turbide (contenant des particules qui la troublent et peuvent être liées à des ravines, une pollution ou des sargasses...), ainsi qu’une observation de l’éventuelle évolution du trait de côte, liée à l’érosion du littoral. L’ensemble de ces informations va permettre de définir au mieux des propositions de ZMEL, avec une délimitation, un règlement d’usages et des équipements adaptés aux besoins des bateaux, soit des bouées en nombre suffisant et adaptées à la taille des différents navires.
Une biohut et des alevins |A biohut with juvenile fish
Une biohut et des alevins |A biohut with juvenile fish

Le suivi annuel des réserves marines se poursuit

Le suivi annuel des réserves marines de Petite-Terre en Guadeloupe, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin se poursuit avec régularité. Ainsi, Julien Chalifour et Vincent Oliva ont quitté Saint-Martin pour Petite- Terre du 18 au 21 octobre 2021, sur invitation de l’ONF et de Ti Té, les gestionnaires. Tous deux se sont ensuite rendus à Saint-Barthélemy du 25 au 27 octobre, pour une mission identique avec l’équipe de l’ATE. Le suivi annuel de la réserve de Saint-Martin, prévu du 6 au 10 décembre, n’a en revanche pas pu avoir lieu, pour des raisons techniques. Il a été repoussé aux 11 et 12 janvier 2022.

Une biohut et des alevins | A biohut with juvenile fish
Une biohut et des alevins | A biohut with juvenile fish

Les alevins apprécient les biohuts.

Si les pêches exploratoires visent, dans le cadre du LIFE BIODIV’OM, à documenter et décrire les arrivages de post-larves sur nos côtes ; l’installation en février 2020 de 14 BioHuts, véritables huttes protectrices accueillant la biodiversité côtière, s’inscrit comme une approche complémentaire. Elles participent également à l’étude de la colonisation des petits fonds côtiers, ainsi qu’à celle des populations des 2 espèces de mérous ciblés. Le 2 septembre 2021 a eu lieu une plongée pour le suivi de ces habitats artificiels, dans lesquels les alevins peuvent grandir hors d’atteinte de leurs prédateurs. Le maillage de métal constituant ces biohuts facilite l’observation des jeunes poissons et sert aussi de support au développement de la nourriture dont ils ont besoin. Cette seconde approche permet également d’observer les arrivages d’espèces moins sensibles à la lumière, qui auraient échappé aux pêches exploratoires.

Tom Desfossez
Tom Desfossez

Deux stagiaires au service du programme Life.

Tom Desfossez, étudiant en BTS gestion et protection de la nature à l’IGPN de Montpellier a accompli du 28 juin au 20 août 2021 un stage à la réserve. Outre sa participation aux missions habituelles de la réserve, il s’est particulièrement consacré au programme Life BIODIV’OM en faveur de la conservation du mérou de Nassau et du mérou géant. Il a prêté main-forte lors de la collecte des post-larves, à leur identification et aux traitements de toutes ces données. Il a mené une enquête auprès des pêcheurs afin de mieux connaître leurs usages, leurs prises et la fréquence à laquelle ils attrapaient des mérous. Il a également élaboré un outil de sensibilisation à la protection des mérous, sous la forme d’une plaquette destinée aux socioprofessionnels : pêcheurs, commerçants, restaurateurs, mais aussi d’information des visiteurs de notre ile. Étudiant en licence de biologie marine à l’Université de La Rochelle, Matthieu Pujol a spontanément présenté sa candidature pour effectuer un mois de stage à la réserve naturelle, sur la base du volontariat. Il a participé à la vie quotidienne de l’équipe et a notamment pris une grande part à l’enquête menée par Tom Desfossez.

Récupération matinale des dispositifs de pêche exploratoire Morning recovery of exploratory fishing devices
Récupération matinale des dispositifs de pêche exploratoire Morning recovery of exploratory fishing devices

Bouclage des sessions de pêches exploratoires dans le programme Life.

Dans le cadre du programme Life BIODIV’OM, la sixième session d’échantillonnage de post-larves a eu lieu du 3 au 9 octobre 2021, à la nouvelle lune, mettant un point final à ces pêches exploratoires. Les données sont en cours d’exploitation et vont permettre de statuer sur l’existence ou non d’arrivées de post-larves de mérou de Nassau ou de mérou géant dans les eaux de Saint-Martin. Ces résultats ne lèveront toutefois pas l’incertitude quant au fait que des arrivages puissent avoir lieu en dehors des périodes et des sites échantillonnés, ou éventuellement que l’échantillonnage ait eu lieu dans des conditions exceptionnelles, liées par exemple aux courants ou à la température de l’eau de mer. Cependant, un grand nombre de post-larves d’autres espèces ont pu être observées, dans des proportions qui ne correspondent pas obligatoirement aux observations de poissons adultes faites en plongée. Le syngnathe, par exemple - cette sorte d’hippocampe déroulé - très présents parmi les post-larves, est beaucoup plus rarement identifié au stade adulte. Ces observations vont également permettre d’adapter le calendrier d’arrivage des post-larves pour faciliter d’éventuelles opérations de restauration d’autres populations, comme celle entre autres des poissons- chirurgiens.

Merci aux bénévoles La réserve naturelle remercie très chaleureusement tous les bénévoles venus lui prêter main-forte au cours de ces sorties en mer, qui se sont déroulées de nuit pour l’installation des pièges lumineux et au petit jour pour leur récupération.
Merci à Clarisse et Jonas La dernière session d’échantillonnage de post-larves a été l’occasion d’accueillir Clarisse Thellier au sein de l’équipe, pour un stage d’octobre 2021 à mars 2022. En année de césure à l’université de Montpellier, cette future ingénieure agronome participe à toutes les missions de la réserve naturelle Cette session a également vu la participation de Jonas Hochart, de l’Agence territoriale de Saint-Barthélemy (ATE). Comme son collègue Karl Questel en avril 2021, il a bénéficié d’un transfert de savoir-faire, prévu dans le programme Life BIODIV’OM. Cette formation, comme celle donnée à l’origine par Ecocéan à la réserve naturelle, a porté sur la technique de pêche exploratoire des post-larves et de leur traitement.

Les actions Ifrecor à Saint-Barthélemy

Le 24 septembre 2021, Julien Chalifour était présent au comité local Ifrecor (Initiative française pour les récifs coralliens) de Saint-Barthélemy, à double titre : en sa qualité d’expert scientifique et en tant que représentant du comité local Ifrecor de Saint-Martin. Il s’est agi de faire le point sur les actions conduites par le comité en 2021 à Saint-Barthélemy – suivi des rejets d’eaux usées de la station d’épuration, collaboration avec une association en charge de restauration coralienne et de revégétalisation des plages et d’une manière générale toute action visant à limiter l’impact sur les herbiers et les récifs – et d’évoquer les projets pour 2022.

Le comité local Ifrecor de Saint-Martin est toujours en phase de structuration. En effet, seuls les élus locaux ont la possibilité de demander officiellement la création d’un comité local, déjà officieusement reconnu par l’Ifrecor.
  • Le 22 septembre, en vue de la prochaine saison touristique, le pôle technique de la réserve a vérifié et remis en état les corps-morts et les bouées de mouillage mises à disposition des bateaux au Rocher Créole et à Tintamare.
  • Le 30 septembre, de nouvelles bouées de mouillage ont été installées au Rocher Créole et à Tintamare.
Les post-larves - The post-larvae
Les post-larves - The post-larvae

Poursuite très positive du programme LIFE en faveur des mérous

Comme nous vous en informions dans notre édition précédente, l’équipe de la Réserve naturelle a été initiée en octobre 2019 au recrutement larvaire, dans le cadre du programme européen LIFE BIODIV’OM en faveur de la conservation du mérou de Nassau et du mérou géant, deux espèces mondialement menacées. À la suite de cette étape préparatoire, il s’agit maintenant pour la Réserve de mettre ces connaissances en pratique en recueillant des post-larves de poissons – dont plus de 90% meurent avant leur installation sur nos côtes – dans l’objectif plus lointain d’identifier les mérous, de les isoler et de les laisser grandir en aquarium, avant de les relâcher dans leur milieu naturel après qu’ils aient atteint une taille leur laissant de meilleures chances de survie. Deux épisodes de collecte exploratoire ont eu lieu en janvier et en février 2020, au cours de 7 nuits consécutives sous la lune la moins claire, afin de maximiser l’efficacité des dispositifs lumineux d’échantillonnage. Les premiers résultats sont très encourageants, tant en matière de nombre d’individus que de diversité des espèces observées. La difficulté étant de distinguer les mérous parmi tous ces alevins, certains individus ont été placés en aquarium jusqu’à ce que l’identification des larves de mérous soit certaine, puis remis à la mer. Cette phase d’exploration, qui inclut l’identification des larves et le calendrier d’arrivage des alevins – toutes les espèces ne se reproduisant pas en même temps – devait se terminer en mai, mais a été retardée par l’arrivée du coronavirus sur la scène mondiale.

Suivi scientifique annuel des récifs et des herbiers Annual scientific study of reefs and sea grass beds
Suivi scientifique annuel des récifs et des herbiers Annual scientific study of reefs and sea grass beds

Compagnonnage entre réserves

Depuis 2007, la Réserve naturelle assure son suivi scientifique annuel des récifs et herbiers, qui s’est déroulé en 2019 du 9 au 12 septembre, avec le concours d’un garde de la Réserve guadeloupéenne de Petite-Terre. Il était venu aider l’équipe de Saint-Martin à documenter l’évolution de l’état des communautés coraliennes et d’herbiers, sur les stations de récifs et d’herbiers habituelles, dans et hors de la Réserve. Cette année, ce suivi pérenne a été complété par un suivi des mérous, dans le cadre du programme LIFE, sur quatre des huit sites visités. Ces sites feront l’objet d’un suivi bi-annuel pendant toute la durée du programme LIFE, soit jusqu’en 2023. Comme à l’habitude, ce compagnonnage a vu l’équipe de Saint-Martin prêter main-forte à Saint-Barth et à Petite-Terre dans les mêmes conditions. Aude Berger s’est rendue à Petite-Terre du 15 au 17 novembre et Vincent Oliva à Saint- Barth du 20 au 22 novembre.

Formation pour Julien Chalifour et Aude Berger
Formation pour Julien Chalifour et Aude Berger

Dans le cadre du projet européen LIFE BIODIV’OM, la mission de la Réserve naturelle de Saint-Martin est de s’intéresser à la conservation du mérou de Nassau et du mérou géant, deux espèces mondialement menacées. Aude Berger - diplômée en sciences et techniques de la mer et titulaire d’une licence professionnelle en protection de l’environnement à l’UAG - a été tout spécialement recrutée en janvier 2019 par la Réserve pour mener ce projet à bien, sur 5 ans. En compagnie de Julien Chalifour, en charge du pôle scientifique de la Réserve, elle a été formée en début d’année aux outils TESSA permettant de mesurer les différents impacts infligés au milieu naturel et leurs conséquences sur les services qu’il rend. Plus récemment, du 24 au 28 juin, les deux scientifiques ont bénéficié d’une formation dispensée par deux professeurs du Centre Resource Management and Environmental Studies (CERMES) de l’université de la Barbade et n’ignorent plus rien de la méthode SocMon, pour «sociomonitoring ». Initialement créée pour les écosystèmes côtiers marins, la méthode a été adaptée aux deux mérous ciblés par le programme LIFE, afin d’appréhender les enjeux liés à ces deux espèces, dont les aspects économiques, l’objectif étant la restauration des populations de ces deux poissons. Pour cela, il va être nécessaire d’acquérir une vue d’ensemble de l’historique de ces espèces, ainsi que la connaissance de leurs usages, afin d’identifier les points de blocage pouvant survenir dans la mise en oeuvre d’une gestion durable et concertée. Ensuite, du 10 au 12 juillet, un troisième professeur du CERMES leur a donné les outils pour mener à bien l’enquête prévue sur le terrain, notamment par le biais d’un questionnaire destiné à faciliter la compréhension des enjeux liés aux mérous pour la population de Saint-Martin.

Récupération des dispositifs - Collecting the tubes in the water
Récupération des dispositifs - Collecting the tubes in the water

Sachant que 90% des larves de poissons, et donc de mérous, meurent lors de la dispersion de ces dernières dans les courants océaniques, la récupération des post-larves et leur élevage constituent un moyen efficace d’augmenter le nombre d’individus. Mais plusieurs questions se posent. Comment recueillir ces tout petits poissons ? À quelle période ? À quel endroit ? En quelle quantité? Et comment les reconnaître ? C’est pour apporter la meilleure réponse à toutes ces interrogations que l’entreprise Écocéan a formé l’équipe de la Réserve naturelle à l’étude du recrutement larvaire, dans le cadre du programme LIFE. Le 3 octobre et les jours suivants, des dispositifs lumineux d’échantillonnage ont été déployés en mer afin de recueillir les larves entraînées par le courant et essaimant l’espace marin où elles se transforment en post-larves, prêtes à coloniser les fonds côtiers. L’opération a dû se dérouler de nuit, ces minuscules animaux étant attirés par la lumière. Cette opération va régulièrement être mise en place sur une durée de deux ans, afin de cibler le meilleur moment pour récupérer les larves de mérous. Une fois la technique de recrutement maîtrisée, les larves seront élevées en aquarium jusqu’à ce qu’elles atteignent une taille suffisante pour retourner à leur milieu naturel et leur permettre d’avoir de meilleures chances de survie.

Colette Buisson en plongée - Colette Buisson diving
Colette Buisson en plongée - Colette Buisson diving

An intern at the Réserve Naturelle from August 15-30, Colette Buisson was a student at the Institut Intechmer of Cherbourg (CNAM), where for three years she trained in engineering techniques for marine environments, and where she successful completed her program. While at the Réserve, she participated in the implantation of the second BioHab2 artificial habitat, not far from Anse Marcel within the perimeter of the Réserve Naturelle, and to study the colonization of these under-water habitats. Encouraged by Julien Chalifour, the young woman decided to enroll for a master’s degree at the University of Corsica.

On recherche bénévoles !
La Réserve Naturelle est à la recherche de bénévoles pour répondre à un questionnaire dédié à une enquête sur la présence de certaines espèces de poissons à Saint-Martin. Si vous êtes intéressez à participer, n’hésitez pas à contacter Aude, reservenat.aude@yahoo.com, 06 90 47 02 13.
Les participants au comité national IFRECOR — IFRECOR national committee participants
Les participants au comité national IFRECOR — IFRECOR national committee participants

Du 3 au 7 juin, la Réserve naturelle a accueilli les 35 participants au comité national IFRECOR (Initiative française pour les récifs coralliens). Créé en 1999 et chapeauté par les ministres en charge de l’écologie et de l’outre-mer, l’IFRECOR a pour mission de mener une politique active favorable à la préservation et la gestion des récifs coralliens. Saint-Martin a été choisi pour organiser cet important événement biennal afin de mettre en valeur notre territoire, presque deux ans après le passage d’Irma. Après une première réunion à la CCISM, les journées de travail se sont succédées à l’hôtel Esmeralda, où le comité était hébergé. À l’ordre du jour : les actions mises en oeuvre par l’ensemble des comités locaux, ainsi que par la Réserve à Saint- Martin - territoire actuellement dépourvu de comité local - pour la protection des coraux, les épaves post-Irma et l’état des lieux après le cyclone, en ce qui concerne notre île. Les récifs coralliens, les herbiers et les mangroves étant menacés dans tout l’outre-mer français, chacun a présenté l’état des lieux de son territoire, dans les trois océans. Parallèlement, les experts scientifiques ont exposé le résultat de leurs travaux et des actions menées en faveur des récifs à travers le monde.

L’IFRECOR est la déclinaison française de l’ICRI (International Coral Reef Initiative). Initiée en 1995 par les États-Unis, plusieurs pays se sont immédiatement associés à l’ICRI : Australie, France, Japon, Jamaïque, Philippines, Royaume- Uni et Suède. L’objectif de l’ICRI est de sensibiliser les communautés riveraines vivant des récifs coralliens, les instances institutionnelles et politiques, les utilisateurs et le public à la conservation de cet habitat sensible et indispensable. L’ICRI est un partenariat entre les gouvernements, les organisations internationales et les ONG. Elle met en oeuvre un plan d’action, suivi par plus de 80 pays sur la centaine comptant des récifs coralliens sur leur littoral.
Blanchissement du corail © IFRECOR — Bleaching of coral © IFRECOR
Blanchissement du corail © IFRECOR — Bleaching of coral © IFRECOR

Alphanova a remis un chèque de 12 000 euros à la Réserve naturelle, dans le cadre de son programme 1% pour le corail. Ce don a eu lieu au restaurant KKO le lundi 3 juin, au cours d’un cocktail offert par Alphanova à l’occasion de l’ouverture du comité IFRECOR à Saint-Martin. Comme nous vous l’annoncions dans notre précédente édition, cette société a mis au point des produits solaires bio et respectueux de l’environnement et a signé une convention de mécénat avec la Réserve de Saint-Martin, à laquelle elle a décidé de verser 1% de son chiffre d’affaires mondial. En échange, la Réserve s’est engagée à favoriser la restauration des coraux sur son espace marin, notamment par bouturage. Début juin, une équipe d’Alphanova Sun a pu découvrir les fonds marins de la Réserve et le travail effectué par l’équipe, en compagnie de Julien Chalifour, de Camille Sanchez et Colette Buisson, les deux étudiantes en stage à la Réserve. Ils ont visité les habitats artificiels devenus depuis octobre 2018 le refuge des boutures de coraux. Certaines de ces boutures ont été récupérées sur les pépinières affaiblies par le passage d’Irma et ont pu être fragmentées afin de favoriser leur multiplication. Également, 200 de ces petites pousses ont été redéployées sur le site de BioHab2, au large de Tintamare. Pour l’heure, la Réserve limite cette activité à ces sites artificiels, dans la mesure où une dérogation de l’État est nécessaire pour réimplanter sa production sur des sites naturels, les deux espèces concernées - coraux cornes d’élan (Acropora palmata) et cornes de cerf (Acropora cervicornis) - faisant partie des espèces protégées dans les Antilles françaises depuis 2017.

Chaque année, entre 15 000 et 20 000 tonnes de crème solaire sont déversées dans les océans et constitue avec le réchauffement climatique l’une des principales causes du blanchiment corallien. Parmi les produits chimiques - et toxiques - destinés à protéger notre peau des UV, l’oxybenzone constitue un poison pour le corail, dont il modifie l’ADN et conduit les nouvelles pousses à mourir sans possibilité de se développer. À Hawaï, où plus de la moitié des coraux ont blanchi entre 2014 et 2015, le gouvernement local a promulgué une loi interdisant la vente et l’usage de produits solaires toxiques pour le corail, applicable dès 2021.
Coraux victimes de la maladie SCTL © Guillaume Jorakhae
Coraux victimes de la maladie SCTL © Guillaume Jorakhae

Déjà fragilisés par le réchauffement climatique et diverses pollutions, les coraux sont depuis moins d’un an la cible d’une bactérie, qui les tue en quelques jours. Très présente en Floride et dans le Golfe du Mexique, cette maladie baptisée SCTL - Stony coral tissue loss, soit «perte de tissu du corail dur» - s’est installée sur la partie hollandaise en début d’année et serait possiblement transportée et essaimée par les eaux de ballast des bateaux de croisière et de transport maritime. Comme son nom l’indique, cette maladie se traduit par une rapide nécrose des tissus vivants à la surface des coraux massifs - corail cerveau, corail cierge... - qui meurent en l’espace d’une semaine sans possibilité de récupération. La présence de cette bactérie a été confirmée au Rocher Créole et à Tintamare. La Réserve naturelle invite les plongeurs et les apnéistes à lui signaler toute nouvelle observation, mais également à prendre les précautions nécessaires afin d’éviter la diffusion, par exemple en désinfectant le matériel de plongée : rinçage à l’eau douce, chloration et séchage au soleil.

Suivi scientifique du récif corallien - Scientific study of the coral reef © Julien Chalifour
Suivi scientifique du récif corallien - Scientific study of the coral reef © Julien Chalifour

Comment évolue la santé des récifs et des herbiers sous-marins depuis le cyclone Irma ? Une question à laquelle a tenté de répondre Emma Bernardin, étudiante en biologie, en 3ème année de licence à l’université Jean-François Champollion, dans le Midi pyrénéen. Elle a contribué à exploiter les données collectées lors des plongées du suivi sous-marin mené par la Réserve en 2018, dans et hors des sites protégés. Pour les herbiers, le constat reste qu’ils ont été faiblement impactés, la station hors réserve de Grand-Case affichant la dégradation la plus importante en termes de densité de plants et d’eutrophisation, en raison d’un enrichissement important de l’eau de mer en matières organiques. Du côté des récifs, on observe une réduction de la couverture corallienne, particulièrement marquée hors de la réserve et à proximité de la Baie Orientale, soit moins de 10% de couverture vivante. Cependant, Irma aura été l’occasion pour ces stations d’un important recul de la couverture en macro algues et en gazon algal.

La première réunion du comité IFRECOR de Saint-Barth The first meeting of the Saint Barth IFRECOR committee © ATE
La première réunion du comité IFRECOR de Saint-Barth The first meeting of the Saint Barth IFRECOR committee © ATE

Auparavant inclus dans le comité local IFRECOR (Initiative française pour les récifs coralliens) de la Guadeloupe, Saint-Barth bénéficie depuis octobre 2018 de son propre comité local, qui s’est réuni pour la première fois le 12 Avril 2019 à Gustavia, sous la coordination de l’Agence territoriale de l’environnement (ATE). Julien Chalifour, en charge du Pôle scientifique de la Réserve naturelle de Saint-Martin, a participé à cette première réunion, qui a été l’occasion pour l’ATE et la collectivité de Saint-Barth d’officialiser le partenariat avec l’IFRECOR et l’Agence française pour la biodiversité (AFB), mais surtout de réunir l’ensemble des acteurs socioprofessionnels de l’île, afin d’animer des groupes de réflexion, avec l’appui d’experts scientifiques. À l’issue de ces ateliers techniques, les principaux enjeux de préservation des coraux et des herbiers marins ont pu être identifiés et priorisés, afin de sélectionner des actions à mettre en oeuvre pour leur conservation.

Corail cerveau - Brain coral
Corail cerveau - Brain coral

IFRECOR - Initiative française pour les récifs coralliens - a choisi Saint-Martin pour tenir la douzième réunion de son comité national, du 3 au 7 juin 2019, et a demandé à la Réserve naturelle de coordonner l’organisation sur place. 35 personnes environ sont attendues, de métropole et d’Outre-mer. Plusieurs personnalités locales seront invitées à participer à l’ouverture officielle, qui se tiendra à la CCISM le lundi 3 juin. Les actualités internationales et régionales en matière de récifs coralliens seront inscrites à l’ordre du jour, ainsi que les thèmes novateurs portés par les comités locaux aux Antilles. En plus petits comités, les jours suivants seront consacrés aux problématiques liées à la conservation des récifs coralliens. Les effets du changement climatique sur les zones tropicales et leurs incidences sur les aménagements des zones littorales seront présentés, ainsi que MERCI, la méthode pour éviter, réduire et compenser les impacts sur les espaces naturels. L’idée au final est de définir les recommandations techniques pour éviter les dégradations sur nos modes de vie et notre environnement naturel.

À l’occasion de ce comité, la Réserve naturelle va lancer un concours de la plus belle photo en rapport avec les récifs coralliens et les zones humides, dont font partie les mangroves de Saint-Martin. La remise des prix aura lieu au cours de l’événement.

Chaque année, entre 15 000 et 20 000 tonnes de crème solaire sont déversées dans les océans et constitue avec le réchauffement climatique l’une des principales causes du blanchiment corallien. Parmi les produits chimiques - et toxiques - destinés à protéger notre peau des UV, l’oxybenzone constitue un poison pour le corail, dont il modifie l’ADN et conduit les nouvelles pousses à mourir sans possibilité de se développer. L’information circule, le consommateur est en demande et de nouvelles crèmes solaires 100% bio et respectueuses de l’environnement apparaissent. La Réserve naturelle encourage bien sûr les baigneurs à utiliser ces produits novateurs et va prochainement signer une convention de mécénat avec Alphanova. Implantée à Hyères, cette société a mis au point des produits solaires respectueux de l’environnement et a approché la Réserve de Saint-Martin, à laquelle elle va verser 1% de son chiffre d’affaires sur les produits solaires au niveau mondial. En échange, la Réserve s’engage à favoriser la restauration des coraux sur son espace marin, notamment par bouturage, et à diriger les activités touristiques et de plongée sur certaines zones, afin de mettre au repos les sites faisant l’objet de surfréquentation. Des membres du personnel d’Alphanova participeront à ces opérations et la société fournira des crèmes solaires et des vêtements anti UV à la Réserve. Également, la Réserve sensibilisera les clubs de plongée en leur demandant d’interdire les crèmes chimiques sur ses sites de plongée.

À Hawaï, où plus de la moitié des coraux ont blanchi entre 2014 et 2015, le gouvernement local a promulgué une loi interdisant la vente et l’usage de produits solaires toxiques pour le corail, applicable dès 2021.

Les éditions guadeloupéennes PLB réédite la collection “La vie du récif”, un coffret composé de trois ouvrages, sur les poissons, les coraux et les créatures du récif. Très utilisés par les plongeurs et les naturalistes sous-marins, ces guides permettant d’identifier les espèces observées sous l’eau sont avant tout conçus pour les passionnés. Ils ont bénéficié d’une mise à jour, à l’occasion de laquelle l’ensemble des gestionnaires d’aires marines protégées de la région a été sollicité. La Réserve naturelle de Saint-Martin y est présentée en détail, ainsi que les aspects liés à la pratique de la plongée sous-marine sur son territoire. Également, La Réserve a très volontiers partagé son expertise sur le bouturage corallien et la création d’habitats artificiels.

© Julien Chalifour
© Julien Chalifour

Suivre l’état de santé du milieu marin, et notamment des récifs coralliens et de leurs populations, est une priorité de l’Ifrecor, Initiative française pour les récifs coralliens.

Dans cette optique, une convention entre la Réserve naturelle et l’Ifrecor, via la Direction régionale de l’environnement, va permettre de développer des indicateurs permettant de suivre l’état de santé des communautés récifales, mais également de faire le bilan de l’activité 2018 du “réseau récifs” dans les Antilles françaises. Ces deux missions ont été confiées à Amandine Vaslet, docteur en biologie marine, qui a récemment évalué le premier plan de gestion de la Réserve naturelle et réalisé le second.
Afin de mener ces deux missions à bien, la scientifique s’appuie sur les données des suivis scientifiques des récifs menés par la Réserve en 2017 et 2018 dans le cadre du réseau des réserves et des suivis Reef Check.

L’analyse de ces données permettra de savoir dans quelle mesure les coraux de Saint-Martin ont été impactés par Irma.

Son rapport est attendu en décembre 2018.

BIOHAB2 © Julien Chalifour
BIOHAB2 © Julien Chalifour

Guillaume Montagne, en stage à la Réserve d’avril à août 2018, a présenté oralement les résultats de son stage devant ses professeurs de l’Université de Calais (ULCO), où il vient d’obtenir sa licence pro Gestion des biens et personnes / aléas naturels et gestion de l’espace urbanisé. En charge des phases de planification, de conception puis d’implantation de BIOHAB2, il a suivi l’évolution de cet habitat artificiel mis en place à proximité du site de plongée du Remorqueur, au large de Tintamare. Un mois après l’immersion des structures, une plongée a permis de constater que la diversité et le nombre d’individus par espèce étaient bien supérieurs à ce qui avait été observé sur BIOHAB1, disparu avec l’ouragan Irma. Les données sont en cours d’exploitation, mais Julien Chalifour suspecte que cette abondance est due d’une part à l’ampleur du nouvel aménagement et d’autre part au pouvoir attracteur lié à la proximité du Remorqueur, déjà surcolonisé. Des bancs de gorettes juvéniles se sont appropriés les lieux, aux côtés de juvéniles de poissons chirurgiens, de poissons papillons, de poissons anges, mais aussi de jeunes langoustes royales. Un mois plus tard, une nouvelle plongée a mis en évidence une augmentation de toutes ces populations et l’incorporation de nouvelles espèces. Les premiers succès enregistrés sur BIOHAB2 ont été mis en lumière par IoTV, la chaîne locale, et seront mis à l’honneur au sein d’une édition de Thalassa dédiée à Saint-Martin et au changement climatique, au début de l’année prochaine (voir article page 6).

Requin dans un récif corallien – Shark in a coral reef © Franck Mazéas
Requin dans un récif corallien – Shark in a coral reef © Franck Mazéas

Du 15 au 17 octobre 2018 au Ministère des outre-mer, Nicolas Maslach, directeur de la Réserve naturelle de Saint-Martin, a participé au comité permanent de l’IFRECOR, l’Initiative française pour les récifs coralliens. Site par site, les études menées sur les fonds marins de l’outre-mer français ont été exposées. Ce bilan a précédé une réflexion sur les stratégies à poursuivre ou à mettre en place pour la conservation des récifs, des herbiers et des mangroves dans les années à venir. Également, différentes méthodes de travail ont été proposées face aux projets d’aménagement menaçant les espaces naturels et ont donné naissance à la méthode MERCI, pour Éviter, Réduire et Compenser. Soit, dans un premier temps, tenter d’éviter l’aménagement, puis, s’il a finalement lieu, agir pour réduire les conséquences sur les milieux marins, et enfin imposer à l’aménageur une obligation de compenser les impacts attendus en finançant notamment des travaux d’ingénierie écologique.

Interview de Nicolas Maslach – Nicolas Maslach interviewed © Chris Joe
Interview de Nicolas Maslach – Nicolas Maslach interviewed © Chris Joe

Du 8 au 11 octobre, la Réserve a rencontré une équipe de l’émission Thalassa, venue réaliser un reportage sur l’évolution de l’île sous l’aspect du logement et de la vie quotidienne, mais aussi de l’environnement. L’impact sur la faune et la flore a été évoqué, ainsi que le redémarrage des écosystèmes et les actions menées pour l’accompagner. Le projet d’habitat artificiel BIOHAB2, celui de bouturage corallien, mais également la création de pépinières destinées à revégétaliser le littoral côtier ont particulièrement intéressé Thalassa, ainsi que le programme “Aire marine éducative”, destiné à sensibiliser les plus jeunes (voir article page 22). L’équipe de journalistes reviendra terminer ce reportage en janvier 2019, afin de suivre l’évolution des projets.

Un quart à un tiers de la mangrove mise à mal par Irma repart. Les récentes fortes pluies ont permis de voir le niveau de l’eau remonter dans les étangs asséchés et ainsi favoriser la croissance des jeunes pousses de palétuviers.
Mérou de Nassau © Julien Chalifour
Mérou de Nassau © Julien Chalifour

Le programme européen LIFE dispose de 3 milliards d’euros pour soutenir les projets en faveur de l’environnement et du climat entre 2014 et 2020. LIFE ayant ciblé cette année les espèces à statut de conservation inquiétant, la Réserve naturelle a présenté un dossier ambitionnant la mise en oeuvre de travaux pour la restauration de deux espèces de mérous. Il s’agit du mérou de Nassau, atteignant rarement sa taille adulte car surpêché, et du mérou géant, que l’on a pu observer localement de manière anecdotique, une fois tous les deux ou trois ans. Appréciés des plongeurs en raison de leur curiosité à leur égard, ces mérous sont des prédateurs supérieurs importants écologiquement - ils pourraient notamment réguler la présence du poisson-lion - mais aussi économiquement à plus long terme, pour la finesse de leur chair. Ce dossier fait l’objet d’une collaboration internationale, avec la Martinique, la Barbade, la Floride et la France métropolitaine, et fait partie d’un programme global proposé par l’outremer français, coordonné par la Ligue pour la Protection des Oiseaux, qui n’est pas sectaire. Le dossier constitué par la Réserve s’articule sur plusieurs projets, l’objectif final étant d’aboutir à une gestion durable de ces populations :

  •   Réalisation d’un bilan socioéconomique sur la place de ces espèces à Saint-Martin en matière d’écologie, de consommation et de tradition.
  •   Suivi de l’état des populations encore présentes. • Sensibilisation du public en général et des scolaires en particulier.
  •   Suivis expérimentaux afin d’étudier le recrutement de ces deux espèces, sachant que les larves de mérous migrent plusieurs mois sur des centaines de miles, au bon vouloir des courants, avant que les post-larves de jeunes mérous s’installent sur les récifs.
  •   L’étude d’une possible évolution réglementaire concernant ces espèces. Plus de 200 000 euros ont été alloués à la Réserve sur la période 2018 - 2023. Ce budget va permettre à la Réserve de financer la venue de spécialistes pour réaliser les diagnostics et former les agents. Un chef de projet sera prochainement recruté : il se partagera entre la projet LIFE et le projet AFB en faveur des tortues marines (voir article page 24).
© Julien Chalifour
© Julien Chalifour

Comme chaque année depuis 2007, le suivi scientifique annuel des récifs et herbiers a eu lieu, en mars 2018.

L’objectif est de documenter l’évolution des fonds marins, Comme d’habitude également, un garde de la réserve naturelle de Petite-Terre et un autre de l’Agence territoriale de l’environnement de Saint-Barth étaient présents, afin d’aider l’équipe de Saint-Martin à collecter les données sous l’eau, sur les sites du Rocher Créole, de Pinel et de Tintamare et, hors de la Réserve, sur le site de Fish Pot, dans le canal d’Anguilla. L’espace marin apparaît moins touché que l’espace terrestre, avec tout de même des zones coralliennes très impactées. Toutefois, si l’impact physique semble avoir été limité sur les récifs et les herbiers, les importants déplacements de sédiments consécutifs à Irma continuent de leur nuire. Ainsi que les rejets d’eaux usées non traitées.

Lancement de BioHab2 - BioHab2 launched
Lancement de BioHab2 - BioHab2 launched

Dans notre dernière édition, nous annoncions qu’il ne restait qu’une vingtaine de parpaings sur les quelques 300 utilisés par la Réserve pour construire les neuf structures des habitats artificiels “BioHab” implantés dans la réserve, après le passage d’Irma.
Le projet n’est pas abandonné pour autant, puisque la Réserve met en place BioHab 2, avec le soutien financier de l’Agence Française de la Biodiversité et la Fondation Veolia, mais cette fois sur deux sites de la réserve.
Plus d’une dizaine d’habitats artificiels ont été réalisés par l’équipe de la Réserve. Si les solutions techniques déjà éprouvées ont été une nouvelle fois utilisées, l’enjeu est cette fois de faire également appel à des matériaux recyclés. Ces habitats artificiels ont pour vocation de proposer un milieu constitué d’une multitude de cachettes, pour être colonisés par les nombreuses espèces qui s’étaient rapidement appropriées l’aire du premier projet.

Ainsi certain débris d’Irma ont une deuxième vie et contribuent à la reconquête de la biodiversité sous-marine.

Les phases de planification, de conception puis d’implantation de BIOHAB2 ont été confiées à Guillaume Montagne, en stage à la Réserve pour quatre mois, d’avril à août 2018, sous la tutelle de Julien Chalifour. Déjà titulaire d’un DTSM Intechmer et d’un DEUST, cet étudiant de 23 ans - également pilote professionnel de drone - est actuellement en dernière année de licence pro Gestion des biens et personnes / aléas naturels et gestion de l’espace urbanisé de l’Université de Calais (ULCO).

Guillaume Montagne

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